Chaque émission est diffusée le premier lundi du mois, de 9h15 à 9h45, et peut aussi être réécoutée sur ce site.
Vous pouvez également découvrir l'objet du mois en visite guidée au musée !
L’objet du mois de février 2025 : bannière de la Société des Agriculteurs d’Uzès
A quoi ça ressemble ?
C’est un drapeau en soie verte bordé de franges dorées, mesurant environ 1 m de haut sur 1 m de large. Le centre est occupé par une bande horizontale de soie blanche, portant un décor brodé des deux côtés. D’un côté il représente dans un écusson un homme portant un long vêtement noir, accompagné de deux enfants. De l’autre côté on reconnaît divers outils, arrangés en composition symétrique, entourés de branches de chêne.Qu’est-ce que ça représente ?
Le personnage avec les enfants est
Saint Vincent de Paul, un prêtre français né en 1581 et mort en
1660, canonisé en 1737 pour son engagement dans les œuvres de
charité. Il a créé plusieurs ordres religieux (Lazaristes, Filles
de la Charité) et fondé à Paris l’hôpital des Enfants Trouvés
pour accueillir les orphelins. C’est pour cela qu’on le
représente souvent comme un prêtre en soutane noire, accompagné de
petits orphelins.
De l’autre côté, les outils représentés sont ceux des agriculteurs : charrue, bêche, fourche, faucille, râteau, fléau, accompagnés très logiquement par des gerbes de blé.
A quoi ça servait ?
Notre objet est une bannière
d’association, comme le revendique l’inscription brodée en
lettres d’or : celle de la « Société des agriculteurs
d’Uzès, Gard, fondée en 1801 ». Elle s’inscrit dans le
système des corporations, hérité de l’Ancien régime. Avant la
Révolution, pour exercer une profession, en particulier dans
l’artisanat, il fallait avoir suivi un apprentissage auprès d’un
membre de la corporation (sanctionné, pour les artisans, par une
épreuve pratique finale, la réalisation d’un « chef-d’œuvre »)
et avoir été reçu dans cette corporation. Les corporations avaient
à la fois un rôle de formation professionnelle, de syndicat
défendant les intérêts de la profession, de « conseil de
l’Ordre » (contrôle du respect des règles) et de mutuelle
qui venait en aide aux membres malades ou à leur famille en cas de
décès.
En 1791, la Révolution supprima le
système des corporations, offrant la possibilité à chacun
d’exercer le métier de son choix. Sous la Restauration, le
rétablissement des corporations fut envisagé mais non réalisé,
cependant à cette période réapparurent des associations
professionnelles, sans réel pouvoir autre que le secours mutuel et
souvent placées sous l’invocation d’un saint catholique. Notre
Société des agriculteurs a été précurseur puisqu’elle est
apparue dès 1801.
Le Journal d’Uzès du 12
octobre 1929 signale qu’elle a été « fondée en Pluviôse,
an IX de la première République [donc en janvier ou février 1801],
elle est certainement une des plus vieilles corporations de France
encore existantes. Notre chère cité d’Uzès a vu maintes fois en
ces dernières années ses adhérents défiler dans les rues de la
ville, précédés de son vénérable drapeau vert. »
Créée sous la Première République,
la Société était-elle placée dès l’origine sous le patronage
d’un saint catholique ? Napoléon Bonaparte, premier consul,
venait de rétablir la liberté de culte… mais la liberté
d’association était étroitement contrôlée. L’objet de la
Société (soutien aux agriculteurs, majoritaires dans la population
à l’époque) était suffisamment consensuel pour permettre son
existence.
Au XXe siècle, les corporations seront
peu à peu remplacées par les syndicats et les mutuelles que nous
connaissons aujourd’hui. Mais la Société était encore active en
1929, puisque l’article du Journal d’Uzès cité plus haut
annonce une réunion de ses adhérents.
De quand ça date ?
Le style de cette bannière et les
broderies visiblement réalisées à la machine sont certainement
plutôt datables de la fin du XIXe siècle que de 1801. Il est
possible que le choix de Saint Vincent de Paul comme patron date lui
aussi de la fin du XIXe siècle, en effet le pape Léon XIII l’avait
institué patron de toutes les œuvres charitables en 1885.
Comment est-ce arrivé au musée ?
Comme pour beaucoup de collections
anciennes du musée, le mode d’entrée de cet objet reste inconnu.
La bannière a été un temps conservée dans la sacristie de
l’ancienne cathédrale d’Uzès, comme le mentionnent les
inventaires des biens de la paroisse établis par le Diocèse en 1905
puis par l’Etat en 1906. Le musée d’Uzès a été créé en
1910. A cette date la Société des agriculteurs d’Uzès était
encore active, on a vu qu’elle le restera au moins jusqu’en 1929.
Par la suite il est possible que la bannière ait été stockée dans
la mairie. Un registre d’inventaire du matériel de la commune
d’Uzès, établi vers 1942, recense trois drapeaux de sociétés
dans la salle des Drapeaux. Hélas il ne précise pas de quelles
sociétés il s’agit ! Le musée se trouvant alors dans
l’hôtel de ville, lorsque le conservateur Georges Borias a établi
un premier inventaire des collections en 1945, il a peut-être inclus
ces vieilles bannières. En tous cas quatre drapeaux de société
figurent dans les collections (celle des Maçons, des Charpentiers,
des Agriculteurs et des Boulangers), sans indication de provenance.
Du fait de la fragilité du tissu,
cette bannière n’est pas exposée en permanence.
L’objet du mois de janvier 2025 : collection de coquillages
A quoi ça ressemble ?
C’est un ensemble d’une vingtaine
de caisses en bois peintes en noir, avec un couvercle vitré. A
l’intérieur sont rangés des coquillages, fixés sur des cartons
portant des inscriptions en latin avec une belle écriture à la
plume.
Qu’est-ce que c’est ?
Il s’agit d’une collection de
coquillages, classés par espèces : les inscriptions en latin
correspondent à leur nom scientifique, le lieu de collecte est
également indiqué.
Qui l’a fait et de quand ça date
?
Cette collection a été constituée au
19e siècle par un Nîmois, Emile Espérandieu. C’était
un employé des chemins de fer, né vers 1851 à Vézénobres. Il ne
faut pas le confondre avec son célèbre homonyme, le commandant
Emile Espérandieu (1857-1939), éminent archéologue et auteur du
magistral Recueil général des bas-reliefs, statues et bustes de
la Gaule romaine. Notre Espérandieu s’intéressait non pas à
l’archéologie mais aux sciences naturelles et plus
particulièrement aux coquillages, qu’il commence à collectionner
à l’adolescence, accumulant ainsi en une quinzaine d’années
2000 espèces différentes. Il les classe et en établit le catalogue
manuscrit. Sa préface, datée du 1er janvier 1890, nous
apprend que la collection a été constituée principalement par
collectes dans les rivières et rivages méditerranéens de Nice à
Agde, et « en draguant avec des appareils perfectionnés ou de
mon invention la vase des marais et des canaux ». Les spécimens
exotiques ont été acquis par échanges avec d’autres
collectionneurs, et par achats : « Quelques espèces
exotiques rares m’ont été vendues au retour des bateaux faisant
le service des mers de l’Extrême-Orient. »
Espérandieu signale qu’il a
collaboré au classement de la collection de coquillages du muséum
de Nîmes, il a donc une certaine expérience dans ce domaine et
reprend d’ailleurs la classification adoptée par le muséum, celle
de Woodward : le scientifique anglais Samuel Pickworth Woodward
(1821-1865), auteur d’un manuel de conchyliologie, publié en
français en 1870.
Il précise quelles sont les espèces
représentées à la fois dans sa collection et celle du muséum, et
surtout, par « un amour-propre bien légitime, que tout
collectionneur comprendra », celles qui ne figurent que dans sa
collection !
Comment est-ce arrivé au musée ?
Emile Espérandieu décède à une date
inconnue. En avril 1913, sa veuve décide d’offrir sa collection au
musée d’Uzès, qui venait d’être créé en 1910. Pourquoi au
musée d’Uzès et pas au muséum de Nîmes ? Peut-être parce
que Mme Espérandieu était née à Moussac et semble y être revenue
après la mort de son mari : elle a sans doute privilégié le
musée le plus proche. De plus, même s’il y avait dans la
collection quelques espèces non représentées au muséum de Nîmes,
ce dernier possédait déjà des spécimens de la plupart de ces
coquillages.
Le 4 mai 1913, le journal Le
Petit Méridional annonce avec enthousiasme : « La
collection offerte à la Ville d’Uzès par Mme
Espérandieu-Rouvière, de Moussac, […] est splendide. Près de 600
spécimens, classés dans 27 vitrines, ont été recueillis dans les
divers pays du monde. Au moyen de ce classement, on peut facilement
faire en quelques heures un cours complet de conchyliologie. On
frémit en songeant à ce qu’il a fallu d’intelligente patience
aux deux époux pour mener à bonne fin ce travail merveilleux. Une
des salles de la mairie est réservée à cette précieuse
collection, qui fera l’admiration de tous les visiteurs. » Le
31 mai suivant, le journal indique que des étagères sont aménagées
pour présenter les vitrines, signe de l’intérêt porté par la
ville d’Uzès à cette collection.
Actuellement, sur les 27 vitrines
citées, 22 sont conservées, 5 ont disparu ; deux caisses
retrouvées en réserve contiennent aussi des coquillages en vrac,
certains encore collés sur leur carton de présentation. Il faut
dire qu’après l’arrivée de la collection, les difficultés
commencent pour le musée d’Uzès : à la suite de la Première
Guerre, les bénévoles qui le soutenaient disparaissent peu à peu.
Le musée sombre alors dans l’abandon jusqu’à l’arrivée de
l’enseignant Georges Borias, qui en devient le conservateur à
partir de 1945. Durant cette période d’abandon, des vitrines ont
pu être déplacées voire volées ou détruites...
Heureusement l’essentiel de la
collection de coquillages est conservé, même si elle ne peut être
présentée en permanence, faute de place. Méditons la conclusion d’
Espérandieu à la préface de son catalogue : « Puisse
mon modeste travail servir d’exemple aux désœuvrés de la vie et
à tous ceux qui traversent le monde infini de la Création, sans
tomber en admiration devant l’éternelle beauté de la Nature. »
L’objet du mois de décembre 2024 : photographie par Ulysse Dumas
A quoi ça ressemble ?
C'est une photographie en noir et blanc
montrant trois enfants, debout devant un mur : une fillette qui
tient d'une main des livres et un panier d'osier, de l'autre un
bouquet de fleurs, un garçon portant un sac à bretelles et un
béret, et un petit garçon vêtu d'une blouse à carreaux.
Comment est-ce arrivé au musée ?
Le négatif de cette photographie fait
partie d'un lot donné par Anita Dumas en 1980 : des négatifs
sur plaques de verre réalisés par son père Ulysse Dumas au début
du 20e siècle, ainsi que son appareil et son matériel
photographique. Des tirages
ont été réalisés à partir de ces négatifs par Catherine
Tauveron en 2009.
Qui l’a fait ?
Ulysse Dumas est né en 1872 dans une
famille aisée de propriétaires terriens à Baron, entre Uzès et
Alès. Il étudie au collège d’Uzès puis au lycée d’Alès,
avant de reprendre la ferme familiale après le décès de son père
en 1897. Parallèlement à son métier d’agriculteur, Ulysse Dumas
se passionne pour l’archéologie, présidant le petit Groupe
Spéléo-archéologique d'Uzès.
A la différence des autres
archéologues amateurs, Ulysse Dumas ne fouille pas juste pour se
constituer une collection, mais mène une véritable réflexion
scientifique qu’il communique dans des publications et transmet
aussi au Comité des Travaux Historiques du ministère de
l'Instruction Publique. Son travail est salué par les spécialistes,
mais sa santé est fragile et il décède en 1909 à seulement 36
ans.
Ulysse Dumas n'était pas seulement un
scientifique mais avait aussi une sensibilité artistique : il
écrivait de la poésie et pratiquait la photographie. Ce nouveau
média était encore réservé aux personnes disposant de bonnes
connaissances scientifiques et techniques et d’une certaine
aisance : les appareils étaient chers, peu maniables, il
fallait faire soi-même le développement en préparant ses produits.
De quand ça date ?
L'usage de la photographie s'est vite
répandu dans les milieux scientifiques, pour fournir des documents
d'une incomparable fiabilité. C'est Gabriel Carrière, conservateur
du musée archéologique de Nîmes, qui apprend la photographie à
Ulysse Dumas à la fin de l’année 1901 : il lui conseille un
appareil d'occasion et lui enseigne le développement des négatifs
et des tirages. Ces photographies ont donc été réalisées entre
1902 et 1907, avant que Dumas ne soit obligé de rester alité.
Qu'est-ce que ça représente ?
Parmi les négatifs transmis par sa
fille, les photographies scientifiques sont peu nombreuses, la
majorité sont des portraits de proches (famille, amis, voisins).
Elles sont toujours prises en plein air, souvent dans la cour de son
mas à Baron.
Leur intérêt tient au naturel des
modèles, au contraire des photographes professionnels de cette
époque (qui abusaient des mises en scène et des retouches). On y
sent la personnalité de Dumas, son regard plein de tendresse mais
sans tricherie.
Cette photographie montre trois enfants
(sans doute frères et sœur d'après leur ressemblance physique),
sur le chemin de l'école, comme l'indiquent les livres de la
fillette. La bourriche d'osier contient probablement le déjeuner des
enfants (à l'époque il n'y a pas de cantine scolaire), le bouquet
de primevères pourrait être un cadeau pour l'institutrice, à moins
qu'il ait été cueilli sur le chemin du retour pour leur mère. Le
plus jeune enfant, comme sa grande sœur, porte une blouse plissée,
boutonnée dans le dos (pour ne pas faire de taches d'encre sur ses
vêtements). Le garçon plus âgé porte une tenue qui évoque un
uniforme militaire (bérêt, veste à boutons métalliques).
Ils posent sans sourire : la prise
de vue est encore un rituel intimidant, avec un gros appareil qui
demande un long temps de pose immobile. Leur sérieux constraste avec
les chevelures décoiffées et les taches de rousseur qui révèlent
leur habitude du plein air.
Cette photographie est un document très
touchant sur la vie quotidienne des enfants de l'Uzège au début du
20e siècle.
L’objet du mois de novembre 2024 : masque Wé, Côte-d’Ivoire
A
quoi ça ressemble ?
C’est
un masque en bois aux formes anguleuses, en fort relief, peint de
couleurs vives (noir, blanc, rouge, bleu).
D’où
ça vient ?
Ce
masque provient de Côte d’Ivoire, il a été produit par le peuple
Wé (autrefois appelé Guéré), qui vit dans une zone de forêt
entre l’Ouest de la Côte d’Ivoire et le Libéria.
A
quoi ça servait ?
Les
masques Wé représentent un esprit protecteur, intermédiaire entre
les divinités et les humains. Notre masque a un aspect effrayant
avec des éléments empruntés aux animaux sauvages (cornes ou
oreilles pointues, langue tirée, crocs). C’est probablement un
« masque guerrier », il avait pour rôle de se mêler aux
combattants afin de les encourager, mais aussi d’imposer le
règlement des conflits internes au village.
Des
chants, danses et mouvements spécifiques étaient associés au
masque. Il faut aussi imaginer que le masque était complété par
des éléments qui ont disparu : on distingue des trous sur les
bords, qui devaient servir à maintenir des éléments évoquant une
chevelure (fibres végétales ou vrais cheveux), ou bien un tissu
permettant de recouvrir la tête. Le porteur du masque était
entièrement dissimulé grâce à des accessoires : une coiffe
de plumes et un costume volumineux (en général une jupe de fibres
végétales). Tout cela n’est hélas pas conservé : les
masques exposés dans les musées ne sont qu'une petite partie de
l'ensemble d'origine. De plus ils ont souvent perdu des éléments et
parfois même leurs couleurs, car les collectionneurs d’art
africain du 20e
siècle ont privilégié l’aspect esthétique des masques et enlevé
tout ce qui aurait pu gêner cette vision. Même quand ces éléments
n’étaient pas enlevés, leurs matériaux fragiles (fibres,
fourrure, plumes) ont souvent été détruits par le temps et les
insectes.
Comment
est-ce arrivé au musée ?
Dès
sa création au début du XXe siècle, le musée avait reçu en don
quelques objets africains. A
partir de 1946, le musée est dirigé par Georges Borias, artiste et
enseignant. La première exposition qu’il organise, en 1947, a pour
thème « L’Art exotique », notion « fourre-tout »
réunissant des œuvres d’Afrique de l’Ouest, de Madagascar, mais
aussi d’Inde, de Chine et du Viet-Nam, prêtées par des
collectionneurs privés. Le conservateur décide alors de développer
les collections du musée dans ce domaine de « l’ethnographie
d’outre-mer »,
liée à Uzès puisque la cité « a
fourni de nombreux cadres colonisateurs ».
Avec les années 1960 et la décolonisation, les acquisitions vont
peu à peu s’arrêter. Notre masque est un des derniers objets
africains acquis par Georges Borias, il a
été acheté en 1975 à un collectionneur privé.
Comment
c’était fabriqué et de quand ça date ?
Les
masques étaient réalisés par des personnes initiées, à partir du
bois d'arbres séléctionnés pour leur propriétés techniques et
symboliques. Le bois est taillé dans la masse, traditionnellement
peint avec des pigments naturels : noir de fumée, ocres ou
couleurs végétales pour le rouge, kaolin pour le blanc. Mais le
bleu vif a été obtenu à partir d'un matériau artificiel, le bleu
de lessive, aussi appelé « bleu Guimet » : des
boules de poudre bleu outremer servant à blanchir le linge,
inventées en 1826 par le chimiste lyonnais Jean-Baptiste Guimet, et
utilisées par les colons français. Cette couleur bleue intense,
très appréciée par les Africains, a été détournée pour peindre
les masques dès le 19e siècle. On en trouvait encore sur les
marchés africains au début des années 2000.
Notre
masque peut donc remonter au 19e siècle, il est en tous cas
antérieur à 1975 (date de son achat).
L’objet du mois d'octobre : « Portrait de Mgr Bauÿn »
A quoi ça ressemble ?
C’est un tableau
représentant un homme aux cheveux gris, portant un manteau bleu à rabat et une
croix autour du cou. Il est assis devant une table et tient un papier enroulé
sur lequel on distingue le dessin d’un bâtiment ; une bourse remplie de
pièces d’or est posée près de lui.
Comment est-ce arrivé au musée ?
Ce tableau fait
partie d’un ensemble de documents appartenant à l’hôpital d’Uzès, qui les a mis
en dépôt au musée en 1949 : plans anciens de l’hôpital, pots de pharmacie,
portraits…
Que représente le tableau ?
Comme l’indique
son costume, il représente un religieux : Bonaventure Bauÿn (1699-1779),
évêque d’Uzès de 1737 à 1779. C’est un évêque très actif qui fonde à Uzès une
école et fait reconstruire l’église Saint-Etienne, détruite pendant les guerres
de religion. C’est lui aussi qui décide d’agrandir l’hôpital.
L’Hôpital
d’Uzès existait sans doute dès le 13e siècle. Au 14e siècle, il occupe déjà son
emplacement actuel, en dehors des remparts de la ville, sur la route de Nîmes.
C’est une institution religieuse, comme tous les hôpitaux du Moyen-Age.
Longtemps gérée par des laïcs, à la suite des guerres de religion, elle passe
sous la tutelle de l’évêque à partir de 1661.
En
1746, Monseigneur Bauÿn décide de reconstruire l’hôpital, trop petit et vétuste :
il ne comprend qu’une petite chapelle et deux salles, et ne peut accueillir que
14 lits. Les travaux, confiés à l’architecte Guillaume Rollin, sont terminés en
1755. Le centre du bâtiment est occupé par une chapelle (ce qui montre bien
qu’il s’agit d’une institution religieuse avant tout). Le nombre de lits est
passé à 49. Les malades hommes et femmes sont séparés, logés d’un côté et de
l’autre de la chapelle. Des salles sont prévues pour la pharmacie et
l’infirmerie : les soins médicaux sont mieux organisés qu’au Moyen-Age. Des
pièces de service (cuisine, boulangerie, grenier, caves, buanderie) permettent
un fonctionnement en autonomie.
Sur le tableau
on reconnaît bien la façade de l’hôpital sur le papier que tient l’évêque, le
portrait rappelle donc son rôle dans la reconstruction, et indique clairement
sa contribution financière par la représentation de la bourse. Il faut savoir
que Bonaventure Bauÿn a financé sur ses fonds propres plus de la moitié du coût
des travaux, le reste provenant de dons et d’une taxe sur la viande de
boucherie.
On peut donc
imaginer que ce portrait a été peint pour lui rendre hommage. Autrefois il
était courant de conserver dans les hôpitaux les portraits des personnes qui
avaient contribué à ces institutions par des dons ou des legs (on les appelait
les « donatifs »). Monseigneur Bauÿn était un « donatif »
exemplaire puisqu’il a aussi choisi de léguer ses biens à l’hôpital après sa
mort en 1779
Qui l’a fabriqué et de quand ça
date ?
On ne le sait
pas : le tableau n’est ni signé ni daté. Mais il a sans doute été peint
pendant ou après la reconstruction de l’hôpital, donc autour des années 1750. Le
peintre n’a pas cherché à idéaliser son modèle, un petit homme maigre d’une
cinquantaine d’années, au visage ingrat avec son grand nez et ses lèvres
minces, mais éclairé par des yeux vifs, du même bleu que le mantelet de
velours. Cette austérité correspond à ce qu’on connaît de la personnalité de
Mgr Bauÿn, qui semblait peu soucieux de gloire et de pouvoir (il a refusé
d’être nommé évêque d’Auxerre puis archevêque de Besançon, pour faire toute sa
carrière à Uzès).
L’objet du mois de
septembre 2024 : « Bello Matinado »
par Félix Charpentier
A quoi ça ressemble ?
C’est une sculpture en plâtre, représentant une femme nue, grandeur nature, qui s’étire.
Qui l’a
fabriqué ?
La sculpture est une œuvre de Félix Charpentier (1858-1924).
Né à Bollène, Charpentier étudie la sculpture à l’école des Beaux-Arts à Paris.
Il devient un sculpteur apprécié, exposant chaque année au Salon des Artistes
Français, recevant de nombreuses commandes publiques : l’imposant monument
commémorant le centenaire de la réunion du Comtat Venaissin à la France
(Avignon, allées de l’Oule), le décor sculpté de la gare de Lyon à Paris, le
monument à Emile Jamais, à Aigues-Vives…
Qu’est-ce que ça
représente ?
Une jeune femme s’étire, elle vient de sortir du lit sur
lequel elle prend appui. Ce thème de la femme au réveil est fréquent dans la
sculpture du XIXe siècle. Mais finalement le sujet importe peu, c’est un
prétexte pour représenter un nu féminin voluptueux, sujet de prédilection de
l’artiste, typique de la Belle Epoque.
Le nu est apprécié mais l’évocation du lit surprend :
un critique décrit « une fille d’Eve, nue comme sa mère. Elle se grandit
en s’étirant : c’est le Matin
qui sort de son lit par la volonté de M. Félix Charpentier – et le peu que le
sculpteur a représenté du lit est trop précisé, gêne légèrement le goût. Mais
cette statue est le chef-d’œuvre de M. Félix Charpentier. La blancheur
immaculée du marbre fait resplendir la forme gracile, souple et nerveuse du
jeune corps et l’on remarque que M. Félix Charpentier a accordé au mieux
l’expression du visage à la volupté de l’attitude. »
De quand ça
date ?
Il y a plusieurs versions de cette œuvre, car comme tous les
sculpteurs du XIXe siècle, Charpentier travaille en plusieurs étapes. Il crée
d’abord un prototype en terre crue modelée. Ce matériau ne se conservant pas,
il en réalise un moulage en plâtre. A partir de ce premier moulage (ou plâtre
original), il pourra réaliser des versions en bronze, en marbre ou en plâtre.
Le plâtre original est exposé en 1907 au Salon des Artistes Français, puis
acheté par l’Etat et déposé au musée de Châteaudun. Une version en marbre est
également commandée en 1908 pour le musée d’Arras.
Comment est-ce arrivé
au musée ?
En 1909, le peintre José Belon décide de créer à Uzès un
musée de peinture et de sculpture (l’ancêtre du musée actuel), grâce aux œuvres
données par ses amis artistes. Belon est un Gardois installé à Paris, où il
fréquente d’autres méridionaux comme Charpentier, originaire du Vaucluse. Un
tableau de Belon (au musée des Beaux-Arts de Nîmes), intitulé « Portraits
de sculpteurs », représente d’ailleurs Charpentier parmi d’autres
sculpteurs, réunis pour l’exposition de leurs œuvres au Grand Palais lors du
Salon de 1908. En mars 1910, José Belon peut donc annoncer triomphalement dans
le Journal d’Uzès le don par Charpentier « d’un moulage grandeur nature de
sa Matinado, dont le succès au Salon
dernier fut considérable ».
Qu’est devenu l’objet ?
La statue est mentionnée parmi les œuvres envoyées pour
l’ouverture du musée d’Uzès en juillet 1910. A cette époque le musée est
installé dans plusieurs salles à l’étage de la mairie. Elle y est toujours en
1945, lorsque Georges Borias, alors jeune professeur de dessin, reprend la
direction du musée, quelque peu tombé dans l’abandon entre-temps. Borias l’inscrit
dans l’inventaire avec une attribution et un titre erronés (« L’Eveil »,
par Alix Marquet), preuve qu’à cette date la statue a perdu son cartel
d’identification. En 1958, Borias est muté à Paris et jusqu’à son retour à Uzès
en 1968, il ne peut s’occuper qu’à distance du musée, fermé par manque de
personnel. Dans les années 1970, la ville d’Uzès achète le bâtiment de l’ancien
évêché, le musée y est transféré et inauguré en 1978. Mais la statue semble
avoir disparu pendant la période de fermeture du musée entre 1958 et
1968 : à ce jour, elle n’a toujours pas été retrouvée. La pauvre Matinado
a sans doute été jugée trop encombrante et démodée, et un employé de mairie a
dû faire de la place sans en avertir le conservateur…
Si vous la retrouvez, prévenez-nous !
L’objet du
mois de juillet 2024 : « Portrait d’Adolphe
Alphand » par Alfred Roll
A quoi ça ressemble ?
Il s’agit d’un petit tableau carré. Il représente un homme à la barbe blanche, portant un chapeau haut-de-forme et un manteau noir, cadré en buste.
Qui l’a
fabriqué ?
La toile est signée en haut à gauche
« Roll » : il s’agit du peintre Alfred Roll (1846-1919). Elève
de Gérôme, Bonnat et Harpignies, il exposa au Salon des Artistes Français de
1870 à 1889 et au Salon de la Société Nationale des Beaux-Arts de 1890 à 1919.
Roll navigua entre naturalisme et art officiel, réalisant avec autant de succès
des décors monumentaux (pour l’Hôtel de Ville de Paris, la Sorbonne, le Petit
Palais) que des scènes de la vie populaire. Ses nombreux portraits alternent
entre gens du peuple et célébrités parisiennes.
Comment est-ce arrivé
au musée ?
Lorsque le peintre José Belon décida en 1909 de créer un
musée à Uzès, il sollicita diverses personnalités pour soutenir son projet. En
tant que président et membre fondateur de la Société Nationale des Beaux-Arts,
Roll était un personnage influent, que Belon eut la fierté de compter parmi les
membres du Comité de patronage du musée... et parmi les donateurs ! En
effet c’est grâce aux dons d’artistes que furent constituées les collections du
musée.
Dans le Journal d’Uzès
du 3 juillet 1910, Belon annonça l’arrivée des premières œuvres : le
tableau de Roll figurait dans cet envoi.
Que représente le
tableau ?
Il représente une célébrité parisienne : Adolphe
Alphand (1817-1891), indispensable collaborateur du baron Haussmann, qui
transforma et modernisa Paris sous le Second Empire. Alphand fut d’abord chargé
de l’aménagement des espaces verts (en particulier le parc des Buttes
Chaumont). La chute de Napoléon III n’entrava pas sa carrière à la ville de
Paris, puisqu’à partir de 1871 il supervisa tous les chantiers publics de la
capitale. L’apogée de sa vie professionnelle fut la direction des travaux pour
l’Exposition Universelle de 1889, comprenant la construction de la tour conçue
par Gustave Eiffel.
De quand ça
date ?
Notre toile n’est pas datée mais c’est une étude
préparatoire pour un grand portrait d’Alphand, actuellement conservé au musée
du Petit Palais à Paris. Dans la version définitive, on voit l’ingénieur au
travail, tenant à la main une liasse de plans, sur un chantier de construction.
Le dôme des Invalides et la date de 1888 figurant sur ce grand portrait nous
indiquent qu’il s’agit certainement du chantier des travaux de l’Exposition
Universelle de 1889. Roll joue des contrastes entre la tenue sombre d’Alphand
et l’arrière-plan clair, entre l’attitude posée de l’ingénieur et l’agitation
des travaux. Il choisit de limiter sa palette au noir et aux nuances de gris,
pour concentrer l’attention sur la figure.
José Belon présente ainsi l’œuvre dans le Journal d’Uzès du 17 juillet 1910 :
« Le maître Roll nous offre la première étude du portrait d’Alphand,
l’ancien directeur des travaux de l’édilité parisienne, l’ingénieur réputé à
qui Paris doit la plus belle part de ses embellissements. Le portrait définitif
d’Alphand peint par Roll figure actuellement au Petit-Palais, à Paris ;
mais pour moi, cette première étude qui n’est qu’un fragment de l’œuvre
définitive, n’en a que plus de prix à mes yeux, car elle est le premier jet de
l’impression reçue, et par la spontanéité de la touche, cette toile nous donne
du talent de Roll la plus haute idée que l’on puisse s’en faire ; car le
grand artiste peint avec une vigueur peu commune et la matière colorante chez
lui ajoute, si l’on peut dire, à la vérité de ses portraits. Cette physionomie
d’Alphand par Roll est donc une des plus belles choses du Musée. »
L’objet du mois de juin 2024 : « Pierre de picote »
Qu’est-ce que c’est ?
C’est un galet poli en roche verte,
collé sur un support de bois avec deux éléments en bois taillé.
Comment est-ce arrivé
au musée ?
Cet objet fait partie d’un ensemble
d’objets (poteries, vestiges archéologiques, outils, documentation) collectés
par Marcel Duret, habitant d’Uzès passionné par le patrimoine local, et donnés
au musée par sa famille après son décès en 2014.
A quoi ça
servait ?
L’étiquette collée sur le support
de bois le précise : ce galet était une « pierre de picote »,
traditionnellement utilisée par les bergers pour protéger leurs troupeaux
contre la clavelée ou variole des moutons (« picoto » en occitan).
Cette roche basaltique à la couleur verte provient des Alpes et on en trouve
des galets dans le lit de la Durance et du Rhône. Elle porte des taches
caractéristiques, ressemblant aux pustules de la variole, d’où son nom
scientifique de « variolite ». Frappés par cette ressemblance, les
paysans ont y vu l’indice d’un pouvoir magique de protection contre la maladie.
Ils suspendaient des galets de variolite au cou des brebis ou en plongeaient
dans l’eau des abreuvoirs.
Les éléments en bois taillé qui
accompagnent notre pierre sont des clavettes : placées de chaque côté du
collier (en bois, en forme de U renversé), elles maintenaient la sangle en cuir
retenant la cloche. Ceci confirme l’inscription de l’étiquette, la pierre
devait être placée dans une sonnaille.
De quand ça
date ?
L’usage des variolites est sans
doute immémorial. Le Dr Marignan, archéologue et ethnologue, leur a consacré
une étude en 1908. Il remarque que les pierres de picote des bergers cévenols
provenaient de sites préhistoriques locaux plutôt que directement de la
Durance ; d’après lui, il est possible que dès le Néolithique on ait
utilisé les variolites comme protection contre les maladies.
Notre variolite a été collectée
avant 1914, probablement par Albert Hugues, auprès de M. Roussel, éleveur de
brebis à Saint-Geniès de Malgoirès. Albert Hugues (1876-1940), viticulteur à
Saint-Geniès de Malgoirès, était aussi un naturaliste avisé, membre de la
Société d’Etude des Sciences naturelles de Nîmes. Ami du paysan-poète Albert
Roux, de Sanilhac, il encouragea ce dernier dans la création d’un Muséon
Uzétien (ancêtre de l’actuel musée d’Uzès) sur le modèle du Muséon Arlaten
fondé par Frédéric Mistral. Ensemble, les deux amis lancèrent dans le Journal d’Uzès du 20 octobre 1912 cet
appel : « Que ceux qui
connaissent encore les légendes de leur village, […] que ceux qui connaissent
nos proverbes locaux, nos remèdes aux rites cabalistiques, ou aux préparations
alambiquées, que ceux-là apportent au Muséon, créé pour conserver sous toutes
ses formes l’âme vivante des ancêtres, le récit des traditions uzétiennes. Que
tous ceux-là apportent au Muséon les vieux objets, les vieilles histoires,
avant que le tout disparaisse pour toujours. » Anticipation étonnante
du concept de « patrimoine immatériel », actuellement au cœur de la
réflexion des musées d’ethnographie ! Si cette quête n’a pas laissé de
traces tangibles dans les collections du Muséon, elle a du moins abouti, deux
ans plus tard, à la publication par les deux amis du recueil Folklore dou parage d’Uzès (Malige,
Uzès, 1914).
Après la Première Guerre, Albert
Hugues, très affaibli, cessa ses recherches. Mais il avait transmis le goût de
la science à son fils Camille Hugues (1905-1986), professeur d’histoire et
éminent préhistorien. C’est Camille Hugues qui fit don de la variolite à M.
Duret en 1981. Son arrivée au musée, 34 ans plus tard, répare une lacune :
en effet, le Muséon Uzétien avait reçu une variolite, comme le signale le Petit Méridional du 20 octobre
1913 : « Don de M. Paul Verdier, de Masmolène, une pierre dite
« picoto », très caractérisée », mais celle-ci avait disparu
depuis...
L'objet du mois de mai 2024 : fontaine de table, fabrique Pichon
A quoi ça ressemble ?
C’est un grand vase avec un couvercle et un robinet sur la panse, posé sur un socle et complété par une vasque en losange. Il est en céramique de couleurs variées, formant comme les veines d’un marbre, et orné de fleurs en relief autour du col et d’un écusson sur la panse.
Qui
l'a fabriqué ?
La
poterie est un artisanat traditionnel des villages de l’Uzège,
grâce à la présence d’une argile abondante et de qualité. Mais
ce n’est qu’au 19e siècle que des potiers s’installent à Uzès
même : une famille de faïenciers marseillais, les Vernet, et
une famille uzétienne, les Pichon.
Contrairement aux Vernet qui n’ont
pas survécu aux années 1860, la fabrique Pichon, encore
actuellement en activité, a su se développer et s’adapter, en se
spécialisant dans la céramique d’ornement (vaisselle de luxe,
cadeaux de mariage, souvenirs pour touristes). Sept générations se
sont succédées depuis le fondateur de la fabrique au début du 19e
siècle, Jacques Pichon. C’est son fils François (1804-1877) qui
lance véritablement l’affaire, aidé par ses trois fils Jules,
Auguste et Alphonse. La fabrique est ensuite reprise par le fils
d’Auguste, Paul. Après ses descendants Henri puis Jean-Paul, c’est
aujourd'hui Christophe Pichon qui poursuit la tradition familiale
dans le nouvel atelier maintenant installé dans les locaux de
l'entreprise Athezza.
Comment c’est fabriqué ?
C’est
la technique appelée « terres mêlées » qui donne cet effet de
marbrures si particulier. Il est obtenu par le mélange, dans
l’épaisseur de la pâte, d’argiles de différentes teintes, à
ne pas confondre avec l’effet donné par des coulures d’engobes à
la surface d’une poterie.
Cette technique, pratiquée dès le
18e siècle à Apt (Vaucluse) mais également en Angleterre, est
reprise par François Pichon qui introduit de nouvelles couleurs. Aux
teintes naturelles des argiles blanche, rouge et brune, il ajoute le
vert (à l’oxyde de cuivre) et le bleu (au cobalt).
Les pièces en terres mêlées ne
sont généralement pas tournées (cela effacerait les marbrures),
mais moulées. Le potier mélange ses argiles colorées pour obtenir
un bloc qu’il découpe en tranches. Ce sont ces tranches qu’il
met en forme dans un moule en plâtre, comme une pâte à tarte dans
un moule. Après séchage la pièce est démoulée puis cuite au four
en deux fois, avec ajout d’un vernis transparent à la deuxième
cuisson.
A quoi ça servait ?
Ce vase est une fontaine de table :
un objet qui permettait de se laver les mains à une époque où
toutes les maisons n'avaient pas l'eau courante. La vasque sert à
recueillir l’eau. Le socle est équipé d'un petit tiroir qui peut
contenir un savon. Cependant la beauté de cette fontaine en faisait
un objet plus décoratif que vraiment fonctionnel.
Prouesses techniques par les
dimensions, le mélange des différentes teintes, l’abondance et le
raffinement du décor, les fontaines de la fabrique Pichon sont de
véritables chefs-d’œuvre. A ce jour, six modèles différents
sont connus : une fontaine réalisée pour le jubilé du pape
Léon XIII en 1888, une pour une famille alésienne, les de
Roux-Larcy, probablement à l’occasion d’un mariage en 1888, une
appartenant toujours à la famille Pichon (actuellement présentée
au musée), deux récemment passées dans des ventes aux enchères,
et notre fontaine. Si le décor est personnalisé aux armoiries du
commanditaire, la forme est toujours identique, en balustre, avec des
anses en anneaux surgissant de mufles de lions, un col bordé de
dentelures et entouré d’une rangée de fleurs. Jean-Paul Pichon
estimait le temps de travail nécessaire à la fabrication de ce
genre de pièce à 2000 heures… à cette époque, on ne comptait
pas son temps pour l’amour du beau métier !
Qui
l'a commandé ?
L'écusson
sur la fontaine porte les initiales JH, il est surmonté d'un chapeau
avec des cordons ornés de pompons. En héraldique, le chapeau
symbolise les ecclésiastiques, le nombre de pompons ou « houppes »
indique le niveau hiérarchique. Ici il y a trois houppes, il s'agit
donc d'un prieur ou d'un chanoine. Les initiales JH peuvent
correspondre au chanoine Jean Huc. Né à Nîmes en 1844, il est
ordonné prêtre en 1869. En 1893, il est nommé directeur de l'œuvre
de la Jeunesse de Nîmes (ou « Œuvre Argaud »). Il est
fait chanoine honoraire en 1900 et chanoine prébendé en 1909. Il
décède en 1919.
De quand ça date ?
Notre fontaine a peut-être été
offerte en cadeau au chanoine Huc pour sa nomination à la tête de
l'Œuvre Argaud en 1893. Cela correspondrait à la période de
fabriation des autres fontaines Pichon, dans les années 1880-1900,
bien que seule celle du pape Léon XIII soit datée avec certitude
(1888).
Comment
est-ce arrivé au musée ?
Cet
objet a été acheté par l’association des Amis du musée à un
collectionneur privé en 2014.
L’objet du mois d’avril 2024 : maquettes en liège de monuments antiques
A quoi ça ressemble ?
C’est un ensemble de trois maquettes
d’édifices, réunies dans une boîte vitrée. Il y a un édifice
sur plan carré formé d’arcades surmontées de colonnes, un pont à
trois niveaux d’arcades, et un fragment de façade avec des
colonnes supportant un fronton triangulaire.
Qu’est-ce que ça représente ?
Il s’agit de trois monuments romains
célèbres du midi de la France : le mausolée de Glanum à
Saint-Rémy de Provence, le Pont du Gard et un vestige du forum
romain d’Arles.
Le mausolée de Glanum était un
monument funéraire. Le Pont du Gard est un élément de l’aqueduc
long de 50 km qui amenait d’Uzès jusqu’à Nîmes l’eau de la
Fontaine d’Eure. Les colonnes et le fragment de fronton sont tout
ce qui subsiste en surface du forum, centre de la ville antique
d’Arles, ils sont englobés dans la façade d’un bâtiment
moderne.
Comment est-ce arrivé au musée ?
Cet objet a été donné en 1967 par
Mme Robert André, propriétaire du château de Saint-Privat, près
du Pont du Gard. Mme André était la fille de Jacques Rouché, qui
dirigea l’Opéra de Paris de 1913 à 1945, et qui acquit le château
en 1916.
Qui l’a réalisé et quand ?
Ces maquettes sont fabriquées en
liège. Cette technique est d’origine italienne, plus précisément
napolitaine. En effet les grandes crèches de Noël sont très
appréciées à Naples. Au XVIe siècle on a commencé à les
installer dans de véritables paysages miniatures, avec des arbres,
des rochers, mais aussi des ruines d’édifices antiques (un
environnement assez courant en Italie !). Pour ces modèles
réduits de constructions, on utilisait une matière première peu
coûteuse et facile à travailler : le liège, produit en
abondance autour de la Méditerranée. Par la suite, cette technique
est reprise à Rome, non plus pour meubler des crèches mais pour
réaliser des versions miniatures des édifices antiques de Rome.
Depuis le XVIe siècle, Rome attirait
les artistes, venus se former au contact des œuvres et des monuments
de l’Antiquité. A partir du XVIIIe siècle, des voyageurs fortunés
venus de toute l’Europe commencent à visiter Rome, c’est le
« Grand Tour », le début du tourisme. Les jeunes gens de
bonne famille viennent voir les vestiges de la culture romaine, dont
ils sont imprégnés par leur éducation (à cette époque, le latin
est la base de la plupart des enseignements, et l’art classique
reste la référence ultime). Beaucoup ramènent des souvenirs de ces
monuments : une gravure pour les plus modestes, un tableau ou
une maquette pour les plus riches... L’architecte anglais John
Soane en achète tout un ensemble, destiné à montrer à ses
étudiants de Londres des édifices qu’ils ne pourraient aller voir
sur place. L’architecte français Cassas fait de même, sa
collection sera achetée par l’Etat pour l’école des Beaux-Arts
de Paris.
Les maquettes en liège restent des
objets de luxe. A la fin du XVIIIe siècle plusieurs sculpteurs
italiens en font leur spécialité. Ils travaillent d’après des
gravures représentant les monuments antiques. Certains vont même
jusqu’à faire leurs propres relevés pour garantir l’exactitude
de leurs maquettes.
La phelloplastique (art de sculpter le
liège) trouve d’autres adeptes hors d’Italie, plus ou moins
sérieux. Si l’archéologue nîmois Auguste
Pelet réalise à partir de 1820 des maquettes des monuments antiques
de Nîmes (conservées au musée archéologique de Nîmes), c’est
dans un but scientifique, avec une précision qui fait encore
aujourd’hui l’admiration des spécialistes.
Mais pour d’autres, c’est une
production commerciale, fabriquée en série. C’est le cas d’un
fabricant marseillais, d’origine italienne ou grecque selon les
sources, Etienne ou Stéphane Stamati. Il démarre son activité
autour de 1790 et sa fabrique fonctionne encore à Marseille en 1810.
En 1808 il ouvre une antenne à Paris : un « cabinet de
phelloplastique » situé 14 rue Vivienne, dans lequel il
présente plus de 40 modèles différents, des monuments de Rome mais
aussi du Midi de la France. Un auteur signale toutefois que
« malheureusement il n’a pas fait dessiner ces monuments, et
plusieurs de ses modèles sont exécutés d’après les gravures de
Montfaucon, qui sont très inexactes » : il n’a pas fait
faire de relevés et travaille d’après les gravures assez
fantaisistes commandées au XVIIIe siècle par le bénédictin
Bernard de Montfaucon pour illustrer son ouvrage « L’Antiquité
expliquée et représentée en figures ».
Parmi les modèles vendus par Stamati,
figurent le mausolée de Saint-Rémy et le Pont du Gard. Nos trois
maquettes pourraient donc bien provenir de la fabrique de Stamati.
Leur manque d’exactitude, évident quand on les compare à leurs
modèles, correspondrait au défaut signalé plus haut. La boîte
vitrée dans laquelle elles sont présentées, avec ses montants en
forme de colonnes, est bien dans le goût néoclassique de la fin du
XVIIIe et du début du XIXe siècle.
Ces maquettes ont pu être acquises à
cette époque par les anciens propriétaires du château de
Saint-Privat, la famille Faret qui y vécut jusqu’en 1865. Une
façon de s’approprier le Pont du Gard voisin...
Réécoutez l'émission Fréquence Musées, avril 2024
L’objet du mois de mars 2024 : « Bacchus » par Antonin Carlès
A quoi ça ressemble ?
Il s’agit d’une statue en plâtre, mesurant environ un mètre
de haut, représentant un jeune homme nu, couronné de grappes de
raisin, tenant à la main une coupe, un félin à ses pieds.
Qui l’a fabriqué ?
Cette statue est une œuvre du sculpteur Antonin Carlès
(1851-1919). Né dans le Gers dans une famille modeste (son père est
ouvrier plâtrier), Carlès se forme aux Beaux-Arts de Marseille,
Toulouse et enfin Paris où il s’installe, devenant un artiste
reconnu. Il expose au Salon à partir de 1878 et très vite, reçoit
commandes officielles et récompenses Membre de la Société des
Artistes Français.
Comment est-ce arrivé au musée ?
En 1909, le peintre gardois José Belon décide de créer à Uzès
un musée de peinture et de sculpture (l’ancêtre du musée
actuel). Belon est installé à Paris, où il fréquente de nombreux
artistes, auxquels il demande de donner des œuvres. Carlès a sans
doute donné la statue à cette occasion, bien qu’elle ne figure
pas dans la liste des premières œuvres reçues par le musée en
1910.
Qu’est-ce que ça représente ?
Carlès a souvent sculpté des figures allégoriques et des
monuments commémoratifs, dans un style académique mêlant
références à l’Antiquité, classicisme et touches de réalisme.
Il a choisi une divinité antique : Bacchus (comme
l’appelaient les Romains) ou Dionysos (son nom grec), fils de
Jupiter (ou Zeus) et d’une mortelle, Sémélé. Comme l’indiquent
la coupe et les grappes de raisin, Bacchus est associé au vin et à
l’ivresse, mais aussi à la fureur et à la transe. Il est souvent
représenté accompagné de satyres (mi-hommes mi-boucs) et de
bacchantes (femmes en transe), parfois monté sur un char traîné
par des panthères. Les panthères rappellent les voyages exotiques
du dieu (qui serait allé jusqu’en Inde), et la sauvagerie qu’il
peut déchaîner chez les humains. Ici pas de char ni de
rugissements, juste un animal paisible ressemblant plutôt à un gros
chat, se prélassant aux pieds de son maître. Quant à Bacchus,
c’est un tout jeune homme à la silhouette gracieuse et androgyne.
En 1497, Michel-Ange avait déjà représenté Bacchus en jeune homme
couronné de grappes de raisin, une coupe à la main (musée du
Bargello à Florence), mais son Bacchus semblait ivre et titubant,
appuyé sur un petit faune qui mangeait des raisins. Carlès nous
donne une version plus lisse et moins sensuelle de la divinité.
De quand ça date ?
Carlès présente une première version en plâtre de cette œuvre
au Salon des Artistes Français en 1904 (n° 2744). Au 19e siècle,
les sculpteurs travaillent en plusieurs étapes. On crée d’abord
un prototype en terre crue modelée. Ce matériau ne se conservant
pas, il faut en réaliser un moulage en plâtre. A partir de ce
premier moulage (ou plâtre original), on pourra réaliser des
versions en plâtre, en bronze ou en marbre.
Le Bacchus connaît un vif succès : le plâtre de 1904 est
acheté par l’Etat, ainsi que le bronze présenté l’année
suivante, au Salon de 1905 (n° 2927). Suivront une version en
marbre, ainsi que de nombreuses versions en bronze et en biscuit de
Sèvres, dans différentes grandeurs. Curieusement, toutes ne sont
pas identiques : certains Bacchus sont complètement nus,
d’autres portent un petit drapé autour de la taille, peut-être
une modification permettant une diffusion « grand public »
de la statuette ?
Notre Bacchus est nu, c’est probablement un surmoulage de la
version en marbre, de même grandeur. En mauvais état, il a
bénéficié en 2009 d’une restauration par André Dumonnet et
Christine Foulché, avec un bon nettoyage, la consolidation de
fissures au niveau des jambes et la réparation des parties brisées :
la main tenant la coupe et la queue de la panthère.
L’objet du mois de février 2024 : « Les Chemins d’André Gide » par Martine Lafon
A
quoi ça ressemble ?
C’est
un ensemble de quatre cadres vitrés mesurant chacun 40 cm de haut
sur 50 cm de large, comprenant chacun une photographie en couleurs et
une estampe en noir et blanc. Les verres des cadres portent des
motifs gravés.
Qui
l’a fabriqué ?
Les
cadres sont signés et datés en bas à droite : « Martine
Lafon, 2001 ». Longtemps installée à Uzès, Martine Lafon est
une artiste qui utilise des formes variées : dessin, estampe,
livre d’artiste, mais aussi interventions « in-situ »
dans des lieux et paysages variés. Artiste nomade, depuis une
trentaine d’années, elle expose et crée dans les endroits les
plus divers, dans toute la France (notamment grâce à des résidences
artistiques) mais aussi en Pologne, en Lettonie...
Qu’est-ce
que ça représente ?
Cet
ensemble formant polyptyque est intitulé « Les Chemins d’André
Gide ». Chacun des cadres porte en légende le nom d’un
endroit de la vallée d’Eure à Uzès, lieu cher à Gide qui
raconte dans son récit autobiographique Si
le Grain ne meurt
les promenades de son enfance lors de ses vacances chez sa grand-mère
à Uzès. On identifie ainsi « Gisfort », « Le
Serbonnet », « Le chemin de la falaise », « Le
chemin des bugadières ».
Le récit de Gide ne pouvait pas laisser insensible Martine Lafon, qui a un temps exercé comme guide conférencière, grâce à sa connaissance approfondie de l’histoire et du patrimoine local. De plus, le paysage est une de ses thématiques de prédilection. Elle aime confronter les détails de paysages photographiés et leur interprétation graphique, en de subtils décalages et variations : « L’usage de la photographie permet de prélever un élément particulier de l’environnement. [...] Il déclenche alors de la matière à dessiner qui revisite la photographie ou lui fait écho » (site www.martinelafon.com ).
C’est ainsi que, s’inspirant de passages de Si le Grain ne meurt, l’artiste saisit quatre fragments de la vallée d’Eure, mis en regard d’estampes qui n’en sont jamais des reproductions fidèles mais plutôt d’autres points de vue, vus sous d’autres angles et transposés de la netteté de la photographie en couleurs à la matière rugueuse du trait en noir et blanc. Les plaques de verre gravées qui recouvrent les cadres achèvent de brouiller les pistes et d’unifier ces images hétérogènes.
Il ne s’agit pas d’une simple illustration du texte de Gide ; l’artiste a choisi de se détacher de la stricte représentation du réel, privilégiant les grandes masses rocheuses plutôt que la rivière et les résurgences qui baignent les prés. Ses estampes dégagent les lignes de force, éliminent la végétation qui pourrait adoucir les contours, révélant « cet étrange amour de l’inhumain, de l’aride » que chantait l’écrivain. Le regard se perd, sans rien pour donner une échelle de proportions : on pourrait tout aussi bien y voir des détails microscopiques qu’un site grandiose. Mais l’artiste ouvre des pistes : un sentier suit la crête d’une dalle calcaire, des marches taillées dans le rocher nous incitent à descendre. Vers quoi ? La rivière reste cachée et la vallée garde son mystère, attraction irrésistible pour un enfant aventureux comme pouvait l’être le petit André... Il n’est pas indifférent de souligner ici la prédilection de Martine Lafon pour les personnages de contes (le Petit Chaperon Rouge, Alice au pays des merveilles, Pinocchio), que la curiosité pousse à explorer des chemins dangereux.
De
quand ça date ?
L’œuvre
est datée de 2001, année du cinquantenaire de la disparition
d’André Gide (1869-1951). Elle a également donné lieu à la
publication d’un livre d’artiste, la même année, aux éditions
Post Rodo à Uzès, « Un
petit mamelon calcaire », André Gide et le paysage uzétien.
Le livre reprend les mêmes images que le polyptique ; les
verres gravés sont remplacés par des feuilles de papier calque
imprimé en blanc. Dans son texte d’introduction, Martine Lafon
note avec justesse que lorsque Gide écrit ses pages sur Uzès, il a
déjà beaucoup voyagé, et que des paysages étrangers viennent se
superposer à ses souvenirs d’enfance. Devant le Pont
Saint-Nicolas, il évoque la Palestine ; la petite cité a pour
lui le charme de celles de l’Ombrie ; quant aux rochers de la
vallée de l’Eure, ils ressemblent à des falaises marines (comme
celles d’Etretat, proches de son domaine normand de Cuverville), et
la « garrigue rauque » préfigure sa fascination pour les
déserts d’Afrique du Nord. Ainsi Uzès est comme la matrice de
tous les paysages de sa vie future. C’est que la petite cité
occupait dans le cœur de Gide une place préservée : racines
familiales, mémoire de ses ancêtres protestants, mélange paradoxal
de douceur et d’austérité...
Comment
est-ce arrivé au musée ?
L’œuvre
a été achetée par l’association des Amis du musée en 2002 avec
le soutien du FRAM (fonds régional d’acquisition pour les musées)
Languedoc-Roussillon. Elle a trouvé sa place dans la salle consacrée
à André Gide. Le musée conserve de nombreux documents et portraits
de l’écrivain mais il est important de montrer que son œuvre est
toujours actuelle et inspire encore les artistes contemporains.
Réécoutez l'émission Fréquence Musées, février 2024
L’objet du mois de janvier 2024 : « Les brodeuses de Pont-l’Abbé » par Berthe Bourgonnier-Claude
A quoi ça ressemble ?
C’est un dessin au pastel, de grand
format (H 105 x L 125 cm), encadré sous verre, aux couleurs
lumineuses : jaune, vert, bleu, violet.
Qui l’a fabriqué ?
Ce pastel est une œuvre de Berthe
Bourgonnier-Claude. On sait peu de choses de cette artiste, qui
vivait à Paris à la fin du XIXe siècle et serait décédée en
1922. Elle est l’épouse du peintre Claude Bourgonnier, dont elle
reprend le nom. Comme lui, elle expose régulièrement au Salon des
Artistes Français, de 1898 à 1921, des tableaux et des pastels.
Pendant longtemps, il a été très
difficile aux femmes de faire carrière comme artistes. L’accès à
une vraie formation et à une reconnaissance professionnelle leur
était restreint, voire interdit : si au XVIIIe siècle
l’Académie royale de Peinture et de Sculpture accepte quatre
femmes (« un nombre suffisant pour honorer
leur talent », selon le directeur), la Révolution
supprime purement et simplement cette possibilité. De même les
écoles d’art n’acceptent pas les femmes, car l’enseignement
artistique repose sur le dessin de nu et il serait inconvenant qu’une
femme soit exposée à la vision de modèles nus… L’Ecole
nationale des Beaux-Arts n’ouvrira ses portes aux femmes qu’en
1897.
Au XIXe siècle, les femmes qui veulent
devenir artistes sont donc souvent formées dans des écoles privées
comme l’Académie Jullian, ou bien elles bénéficient d’un
apprentissage familial grâce à un père ou un époux artiste. Pour
faire connaître leurs œuvres, elles doivent exposer aux Salons qui
présentent chaque année à Paris l’actualité de la création. Là
encore leur place est marginale : 5 % des peintres en 1863, 15 %
en 1889… Beaucoup de femmes sont contraintes d’abandonner leur
carrière artistique quand elles se marient et ont des enfants :
dans la société bourgeoise du XIXe siècle, la place de la femme
est au foyer.
Face à toutes ces difficultés, des
femmes artistes décident de se regrouper et de créer leur propre
Salon : l’Union des Femmes Peintres et Sculpteurs est créée
en 1881. Berthe Bourgonnier-Claude en fait partie, elle expose au
Salon de l’Union et obtient même le 2e prix en 1907.
De quand ça date ?
L’œuvre est signée mais pas datée.
Dans les années 1907 à 1911, Berthe Bourgonnier-Claude a exposé au
Salon beaucoup de scènes situées en Bretagne, ce pastel date sans
doute de cette époque.
Qu’est-ce que ça représente ?
Un groupe de femmes en costumes bretons
sont installées en plein air, en train de faire de la broderie. Le
soleil filtré par le feuillage des arbres fait des taches de lumière
sur leurs vêtements.
Depuis le milieu du XIXe siècle, la
Bretagne, longtemps isolée, est devenue plus accessible grâce au
chemin de fer et le tourisme commence à s’y développer avec la
mode des bains de mer. Les Parisiens découvrent avec étonnement les
paysages sauvages et les habitants en costumes traditionnels colorés,
qui ne parlent pas toujours français… tous les ingrédients de
l’exotisme sont là, sans même quitter les frontières de la
France ! Les ethnologues se passionnent pour des traditions qui
sont sur le point de disparaître (c’est l’époque de création
des premiers musées de folklore breton). Les artistes cherchent des
sujets pittoresques. Gauguin, à Pont-Aven, sera le plus illustre,
mais il n’est pas le seul.
Berthe Bourgonnier-Claude suit ce
mouvement initié trente ans auparavant, en allant dessiner une
activité traditionnelle du Finistère : la broderie, d’abord
exercée par les hommes, puis par les femmes à partir du XXe siècle
(59 brodeuses recensées en 1901 à Pont-l‘Abbé), un savoir-faire
qui se maintient de nos jours car il y a chaque année une Fête des
Brodeuses à Pont-l’Abbé, avec le couronnement d’une reine des
brodeuses.
Sans avoir la modernité des Nabis, ce
pastel a des couleurs audacieuses qui peuvent trahir leur influence.
Par ailleurs le choix du sujet
correspond bien à ce qui était admis pour une femme artiste :
des natures mortes, des portraits, des scènes de la vie domestique
ou familiale, surtout pas de nu ou de sujets pouvant offenser la
morale. Les cabarets ou les maisons closes, si souvent représentés
par les peintres de cette époque, restent réservés aux hommes !
Comment est-ce arrivé au musée ?
Ce pastel a été offert au musée en
1913 par la duchesse d’Uzès. La duchesse était elle-même
artiste, elle pratiquait la sculpture sous le pseudonyme de Manuela.
C’était aussi une militante féministe, qui se battit toute sa vie
pour le droit de vote des femmes. Enfin c’était une personnalité
mondaine, elle-même issue d’une grande famille de l’aristocratie
(Rochechouart-Mortemart) et veuve du duc d’Uzès. Pour toutes ces
raisons, l’Union des Femmes Peintres et Sculpteurs l’avait
désignée comme présidente.
Avec ce don, la duchesse a donc fait
une double bonne action : elle a d’abord soutenu une artiste
membre de l’Union en lui achetant une œuvre, et elle a aussi
enrichi le musée qui venait de se créer à Uzès en 1910.
Réécoutez l'émission Fréquence Musées, janvier 2024
L’objet du mois de décembre 2023 : « Les Portefaix » de Xavier Sigalon
A quoi ça ressemble ?
C’est un tableau mesurant 65 cm de
haut sur 81 cm de large, représentant deux personnages à mi-corps
sur un fond sombre : deux jeunes hommes aux cheveux bruns et
bouclés. L’un est de trois-quarts, il porte un béret et une
écharpe rayée. Sa main est posée sur l’épaule du deuxième
personnage. Ce dernier est de profil, sa tête est couverte d’un
tissu blanc.
Qui l’a fait ?
C’est une œuvre du peintre Xavier
Sigalon. Né à Uzès en 1787, dans la rue qui porte désormais son
nom, il était le fils d’un pauvre instituteur. En 1816 il partit à
Paris pour réaliser sa vocation de peintre, choisissant des sujets
dramatiques tirés, entre autres, de pièces de Racine.
A partir de 1822,
il connut un début de carrière prometteur, avec une renommée égale
à celle de Delacroix : le journaliste et futur homme politique
Adolphe Thiers écrivit à son sujet en 1824 « Un grand
peintre est né à la France ». Mais Sigalon ne réussit
pas à percer et après le mauvais accueil de sa grandiloquente
Athalie en 1827, il renonça à la grande peinture d’histoire
et retourna à Nîmes. Il vécut alors grâce aux portraits qu’il
peignait sur commande pour les membres de la bourgeoisie nîmoise. Il
mourut à Rome en 1837, victime d’une épidémie de choléra, alors
qu’il s’apprêtait à terminer une copie de la fresque du
Jugement dernier de Michel-Ange, commandée par l’Etat.
De quand ça date ?
La toile n’est ni signée ni datée
mais elle porte au revers la marque du marchand « Chavent / Rue
Cléry n° 19 / à Paris ». Ce marchand de matériel pour
peintres aurait été actif de 1827 à 1845. Après plusieurs années
à Paris, Sigalon était revenu à Nîmes en 1833 avant de partir
pour Rome, où il mourut en 1837.
Comment est-ce arrivé au musée ?
Ce tableau a appartenu à un Uzétien,
Armand Verdier, comte de Flaux (1819-vers 1883), descendant d’une
prospère famille de négociants uzétiens. Le comte de Flaux se
présentait comme « homme de lettres » et était aussi un
amateur de peinture, qui tenait un registre de ses collections de
peintures. Il y mentionne l’achat de ce tableau en 1858, pour 300
Fr, aux héritiers d’un collectionneur nîmois « qui le
tenait de Sigalon lui-même ». Le tableau a ensuite été
transmis à sa fille Marguerite (1852-1936). La famille de Flaux
était apparentée à celle de l’écrivain André Gide :
l’épouse du comte de Flaux était la nièce de la grand-mère
paternelle de Gide. Celui-ci évoque dans « Si le Grain ne
meurt » le souvenir de Marguerite, la « cousine de
Flaux » à la beauté troublante, qu’il mordit à l’épaule
alors qu’il n’avait que 5 ans ! Marguerite de Flaux épousa
le baron de Charnisay. Le tableau de Sigalon fut conservé par les
descendants de la famille de Charnisay dans le château familial en
Saône-et-Loire, jusqu’à sa mise en vente aux enchères à
Neuilly-sur-Seine le 25 novembre 2021. C’est la ville d’Uzès qui
en a fait l’achat pour le musée, avec l’aide du Fonds régional
d’acquisition pour les musées de la région Occitanie.
Qu’est-ce que ça représente ?
Le thème est surprenant : ces
deux jeunes hommes en buste n’appartiennent pas à la bonne société
nîmoise dont Sigalon fut le portraitiste, il ne s’agit pas non
plus d’une scène historique ni même d’une scène de genre car
ils sont isolés sur un fond sombre, sans référence à leur
environnement.
Selon le registre du comte de Flaux, ce
sont des portefaix nîmois, que Sigalon avait remarqués dans la rue
pour leur physionomie et fait monter dans son atelier pour les
représenter tels qu’ils étaient vêtus, l’un portant encore sur
la tête un sac de toile rembourré de paille servant à protéger
son dos. Les portefaix étaient une main-d’œuvre indispensable
pour le transport des charges lourdes, à une époque où
n’existaient ni camions, ni ascenseurs. C’étaient souvent des
journaliers, qui proposaient leurs services dans la rue à qui
voulait : commerçants, locataires voulant déménager...
La position très rapprochée des
visages renforce l’impression d’un lien entre les deux
personnages. Lien de parenté ? on dirait presque le même
visage, de profil et de trois-quart. Lien affectif ? la
tendresse de la main sur l’épaule contraste avec la dureté des
visages sans sourire.
Réécoutez l'émission Fréquence Musées, décembre 2023
L’objet du mois de novembre 2023 : couteaux de jet africains
A quoi ça
ressemble ?
C’est un ensemble de quatre objets, composés de lames de fer
aux formes recourbées et d’une poignée recouverte de fibres végétales tressées.
A quoi ça
servait ?
Il s’agit d’armes africaines : des couteaux de jet, armes
de chasse et de combat destinées à être lancées pour atteindre la cible à
distance (jusqu’à une trentaine de mètres). Les différentes lames tranchantes
garantissent l’efficacité, quel que soit le côté par lequel le couteau arrive.
La poignée recouverte de vannerie offre une bonne prise en main.
Ces armes impressionnantes sont vite devenues des objets de
prestige, symbolisant la puissance des guerriers, mais ne servant plus au
combat pour ne pas risquer de les perdre. Elles ont même parfois été utilisées
comme monnaie d’échange.
D’où ça vient et de
quand ça date ?
Ce type d’armes était fabriqué en Afrique centrale
(Cameroun, Tchad, Centrafrique, Congo). Ces couteaux proviennent de l’Oubangui
(actuelle République Centrafricaine). Ils ont été collectés à la fin du 19e
siècle par le duc d’Uzès, Jacques de Crussol, lors de son expédition le long
des fleuves Congo et Oubangui. Né en 1868, le jeune duc Jacques a mené jusque
là une vie oisive à Paris ; on lui prête une liaison avec Emilienne
d’Alençon, célèbre « demi-mondaine » de la Belle Epoque. Sa mère, la
duchesse Anne de Rochechouart-Mortemart, cherche à l’éloigner de ces
tentations. Elle l’encourage donc à se lancer dans une expédition en Afrique,
qu’elle finance elle-même. Au départ, le but de l’expédition est
scientifique : il s’agit de remonter le cours du fleuve Congo jusqu’aux
Stanley Falls, puis de chercher un débouché vers le Nil. Le duc est accompagné
d’un journaliste-photographe, d’un lieutenant et de trente tirailleurs
algériens. Partie de Marseille le 25 avril 1892, l’expédition remonte le fleuve
jusqu’à Brazzaville. Ne pouvant continuer jusqu’aux Stanley Falls, qui sont en
proie à un soulèvement de la population, elle bifurque alors vers Bangui et le fleuve
Oubangui. Ce sont des territoires colonisés par la France, où des membres de
l’administration coloniale française ont été massacrés par la population
locale. L’administrateur Dolisie souhaite riposter en organisant une expédition
punitive contre les Boubous, à laquelle la troupe du duc d’Uzès participe,
secondée par la tribu rivale des Nzakkaras. De nombreux villages Boubou sont
détruits. Les armes des ennemis sont saisies comme trophées.
Mais le duc et ses hommes sont éprouvés par le climat
africain et des cas de dysenterie se déclarent. Jacques de Crussol décide de
revenir en France. Il n’en aura pas le temps : il meurt à 24 ans, le 20
juin 1893, dans le port de Cabinda (Angola). Le corps rapatrié sera inhumé à
Uzès le 27 septembre 1893.
Comment est-ce arrivé
au musée ?
Les armes collectées par le duc sont expédiées à sa famille,
d’abord à Paris puis à Uzès. Le Journal
d’Uzès du 15 juillet 1902 annonce l’arrivée au château ducal « des
armes curieuses que le duc d’Uzès [...] avait réunies pendant qu’il explorait
les terres lointaines de l’Afrique et qu’il comptait rapporter lui-même en
France, mais qui durent suivre sa dépouille mortelle. » L’article
mentionne des « instruments tranchants sur toutes leurs faces » parmi
les armes provenant de « peuplades à demi-sauvages »...
Après la mort de Jacques de Crussol, c’est son frère Louis
(1871-1943) qui devient duc d’Uzès. Il a deux fils, Géraud et Emmanuel. Géraud
étant l’aîné, hérite du titre de duc ; quant à Emmanuel, il est marquis de
Crussol. Il épouse en 1924 Marie-Louise Béziers, fille d’un industriel breton.
Malgré ses origines bretonnes, la marquise de Crussol est très attachée à
Uzès : dans les années 1950, elle s’installe au château ducal dont elle
entreprend la restauration. Elle se bat également pour que la ville d’Uzès
bénéficie de la loi Malraux, qui permettra la réhabilitation du centre-ville
ancien.
C’est elle qui a fait don au musée de ces armes africaines
en 1956, probablement sur la demande du conservateur Georges Borias, qui avait
à cœur de faire entrer au musée les « arts exotiques » et de montrer
l’apport culturel dû à la présence à Uzès de nombreux anciens cadres de
l’administration coloniale.
L’objet du mois d'octobre 2023 : statue-menhir du Bon Diablet
A quoi ça
ressemble ?
C’est une dalle de pierre calcaire, de forme ovale. Sur une des faces, la pierre a été
taillée pour dégager des formes en relief. On distingue des lignes évoquant
sommairement un visage et des bras ; il y a aussi des incisions parallèles
sur les côtés.
De quand ça date ?
Ce type de dalle de pierre sculptée avec une figure humaine
est appelé « statues-menhir ». Elles datent de la fin de la
Préhistoire, plus précisément du Néolithique. C'est une période-charnière en
Europe, avec la diffusion d'un mode de vie bien différent des périodes
précédentes : des populations venues de Méditerranée orientale à partir du
6e millénaire avant notre ère commencent à pratiquer l'agriculture et
l'élevage, ainsi que la poterie, et se sédentarisent progressivement. Le
changement est très lent, les nouveaux venus cohabitent pendant des siècles
avec les populations locales, toujours nomades et vivant de chasse et de
cueillette. La fin du Néolithique correspond à l'expansion du nouveau mode de
vie et à un essor démographique. Ces premiers paysans construisent des maisons
regroupées en véritables villages. Ils marquent aussi le paysage, en dressant
des pierres, isolées ou alignées, les menhirs : le phénomène du
mégalithisme apparaît au 4e millénaire avant notre ère. C'est par analogie avec
les menhirs que l'abbé Frédéric Hermet a inventé le mot
« statue-menhirs » pour désigner les stèles de pierre sculptée qu'il
a découvertes en Aveyron à la fin du 19e siècle. On sait maintenant que ces
figures se sont répandues en Méditerranée occidentale (France, Italie, Suisse,
Espagne, Portugal) au Néolithique final, entre 3200 et 2500 avant notre ère. En
France, on en trouve en Occitanie, réparties dans deux zones : le Rouergue
(Tarn et Aveyron) et le Bas-Languedoc (Hérault et Gard).
A quoi ça
servait ?
Il est bien difficile de le savoir puisque par définition,
nous n'avons aucun témoignage écrit de la Préhistoire ! De plus, beaucoup
de ces dalles n'ont pas été découvertes dans leur site d'origine mais
réutilisées et déplacées au fil des siècles. Celles qui ont été trouvées encore
in situ étaient soit dans un lieu d'habitat, soit dans un contexte funéraire.
A défaut de contexte, les archéologues ont observé les types
de représentation. La figure humaine est généralement très schématique, avec
des formes géométrisées. Quelques traits et points suggèrent le visage (dont la
bouche n’est jamais représentée), les bras et les mains, ainsi que des
accessoires plus ou moins identifiables (parures, armes ou outils). Des jambes
apparaissent sur les stèles du Rouergue, dont les deux faces peuvent être
décorées ; mais sur les stèles du Bas-Languedoc, il n'y a généralement
qu'une seule face sculptée et pas de jambes.
Notre stèle est bien représentative de ce deuxième groupe.
On distingue un visage avec la ligne des sourcils, celle du nez et les deux
points des yeux. On reconnaît aussi les bras, dans le prolongement de la ligne
des sourcils ; ils sont repliés avec les mains posées sur le torse. Les
incisions parallèles sur les flancs symbolisent les côtes. Deux pastilles entre
le visage et les mains pourraient être interprétées comme des seins. Les
spécialistes ont longtemps pensé qu'il y avait des figures féminines, avec la
représentation de la poitrine et de colliers, et des figures masculines, avec
des attributs de pouvoir (baudrier, arc, bâton en forme de crosse,
« objet » parfois identifié comme un poignard). Certaines stèles ont
même changé d'attributs (et donc de sexe !)
puisqu'on a pu constater des modifications anciennes... Mais
actuellement la prudence est de mise : ces pastilles ne sont peut-être pas
le symbole d'une poitrine féminine mais d'une cuirasse ou de peintures
corporelles.
Ces figures étaient-elles celles de divinités, de héros,
d'ancêtres ? En tous cas elles étaient importantes pour les populations de
cette époque puisque la réalisation de ces stèles a demandé de longues heures
de travail : il a fallu extraire un bloc rocheux, le transporter parfois à
plusieurs kilomètres, le tailler, le polir, le dresser en enfonçant la base
dans le sol...
Comment est-ce arrivé
au musée ?
Cette stèle a été trouvée par un Uzétien, M. Joseph
Cathébras, en 1995 au lieu-dit « Le Bon Diablet », dans les bois de
Saint-Quentin la Poterie. Elle avait été remployée à une époque récente,
intégrée à un muret de pierre sèche. Le muret s'étant écroulé, l'œil exercé de
M. Cathébras (qui faisait partie de l'association Histoire et Civilisation de
l'Uzège) a distingué dans le tas de pierres la figure sculptée d'une
statue-menhir. Le découvreur a conservé la stèle une vingtaine d’années chez
lui avant de décider de la proposer au musée. Elle a pu être acquise grâce à
l'aide du Service Archéologie de la DRAC Occitanie, fin 2015.
L’objet du mois de septembre 2023 : portrait du Dr Bois par José Belon
A quoi ça ressemble ?
C’est un tableau représentant le
buste d’un homme âgé, chauve, avec une barbe blanche.
Qui l’a fait et de quand ça date
?
Le tableau est signé
et daté en bas à droite : « José Belon / 1915 ».
Belon (1861-1927), né à Alès, avait fait acarrière comme peintre
et illustrateur à Paris mais restait très attaché au Gard et en
particulier à Uzès où il avait de la famille. C’est à Uzès
qu’il avait voulu créer un musée de peinture et de sculpture,
constitué de dons de ses amis artistes et accueilli à l’étage de
l’Hôtel de Ville.
Qui est-ce que ça représente ?
Une étiquette en métal gravé, fixée
sur le cadre, nous l’apprend : « Dr Louis Bois /
1856-1920 ».
Bien qu’originaire de la Drôme, le
docteur Louis Bois fut un personnage éminent d’Uzès. Il est né
en 1856 à Montmeyran, dans une famille protestante (son père était
pasteur et fut le doyen de la faculté de théologie de Montauban).
Pendant ses études de médecine, il épouse une Uzétienne,
Elisabeth Martin. Le couple s’installe à Uzès, rue Petite
Bourgade. Après le décès de son épouse, qui lui laisse deux
petites filles, le Dr Bois se remarie avec une Drômoise, Suzanne
Faure.
Louis Bois était médecin mais ne
semble pas avoir exercé longtemps cette profession, il est désigné
dans les recensements comme « propriétaire » et vivait
probablement de ses rentes. Cela ne l’a pas empêché de reprendre
une activité médicale lorsque les circonstances le demandaient :
pendant la Première Guerre il propose spontanément son assistance
au médecin-chef de la place d’Uzès, et par la suite il se met au
service de la Croix-Rouge pour soigner les plus démunis.
Mais le Dr Bois s’implique aussi dans
de nombreuses activités, en particulier le journalisme. Il est
correspondant de journaux régionaux (le Petit Marseillais, le
Petit Méridional), et surtout très actif dans l’hebdomadaire
local, le Journal d’Uzès (ancêtre du Républicain
d’Uzès). Il y tient la chronique locale sous le pseudonyme de
« Jan du Moutas » et préside le syndicat de la presse du
Gard. Pendant la Première Guerre, il remplace même le directeur du
Journal d’Uzès, appelé sous les drapeaux.
Il est aussi associé à la création
du musée d’Uzès. Dès le 9 janvier 1910 il annonce dans le
Journal d’Uzès le projet de musée de José Belon. En
février 1910, il fait partie du comité de patronage du futur musée.
Parallèlement à ce projet, le félibre Albert Roux prépare de son
côté la création d’un Muséon Uzétien sur le modèle du Museon
Arlaten créé par Frédéric Mistral à Arles : là encore, le
Dr Bois est impliqué dès mars 1910, comme secrétaire du comité
d’initiative pour le Muséon. Cet engagement est reconnu par la
municipalité : en 1913, il est nommé conservateur (bénévole)
du musée, regroupant les collections constituées par José Belon et
par Albert Roux.
Comment est-ce arrivé au musée ?
C’est l’artiste qui a offert ce
tableau au musée, comme le rappelle la dédicace inscrite au dos de
la toile : « Pour le musée d’Uzès / J. Belon ».
Après le décès du
Dr Bois en 1919, José Belon lui rend hommage dans le Journal
d’Uzès du 15 juin 1919 et revient sur les circonstances de la
création du tableau : « l’on ignore trop encore à Uzès
le zèle que déploya le dr Bois au moment de la fondation du Musée
de cette ville. Pendant des mois entiers, je puis dire ; pendant
que je groupais à Paris les éléments artistiques nécessaires à
cette fondation, le dr Bois, lui, ne cessa de m’entretenir
longuement, par correspondance, – et cela d’une façon toute
désintéressée – des travaux de la commission locale, comme aussi
des démarches personnelles qu’il avait faites auprès des
autorités de la région. Sans se lasser, il m’a, pour ainsi dire,
au jour le jour, mis au courant de ses faits et gestes, et c’est
bien pourquoi en témoignage de ma reconnaissance, lors de mon
dernier séjour à Uzès, j’ai tenu à fixer ses traits sur la
toile, pour qu’ils perpétuent le souvenir de celui qui fut le plus
actif des collaborateurs dans la mise en œuvre de ce projet.
Maintenant je ne
sais si dans l’avenir, [...] les étrangers visitant le Musée
municipal s’intéresseront suffisamment à cette peinture et à
l’effigie du regretté docteur, mais je puis toutefois indiquer un
moyen facile d’attirer leur attention, c’est de faire graver sur
un cartouche, au bas du cadre de ce portrait, cette simple
inscription, explicative autant que justifiée et méritée :
« Hommage au Dr Louis Bois / Co-fondateur du Musée
d’Uzès ».
Le souhait de Belon a bien été
exaucé, avec la pose d’une étiquette sur le cadre, sans doute
dans les années 1960... mais avec une erreur dans la date de décès
et sans préciser le rôle du Dr Bois, qui est donc resté un homme
de l’ombre. Non exposé car en mauvais état, le portrait a été
restauré en 2012 et il est reproduit dans le tome 1 du Dictionnaire
biographique des protestants français de 1787 à nos jours, paru
en 2015 et dirigé par Patrick Cabanel et André Encrevé (notice
biographique du Dr Bois rédigée par Madeleine Souche).
L’objet du mois de juillet 2023 : disques de musique russe d’André Gide
Qu’est-ce que c’est ?
C’est un ensemble de onze disques 78T dans des pochettes en papier. Leurs étiquettes sont imprimées en russe et portent des inscriptions au crayon en français.
De
quand ça date et à qui est-ce que ça appartenait ?
Ces
disques appartenaient à l’écrivain André Gide (1869-1951). Il
lui avaient été offerts lors de son voyage en URSS en 1936.
Gide
a longtemps été assez éloigné de la politique et plutôt
conservateur. Après son voyage au Congo en 1925-26, il prend
conscience des injustices subies par les sujets de l’empire
colonial français. Peu à peu, il se rapproche du Parti Communiste,
dont plusieurs de ses proches sont déjà adhérents. Ensemble, ils
se mobilisent pour les écrivains allemands menacés par la montée
du fascisme.
Staline
voit alors l’occasion d’utiliser l’écrivain célèbre au
service de sa propagande et l’invite à séjourner en URSS. Gide
part en juin 1936, en compagnie d'autres écrivains, sympathisants ou
communistes convaincus : Eugène Dabit, Louis Guilloux, Pierre
Herbart, Jef Last et Jacques Schiffrin. Le voyage dure deux mois et
les emmène de Moscou et Leningrad à la Mer Noire et la Géorgie,
enchaînant les visites d'usines et de kolkhozes. La fin du séjour
est marquée par la maladie et la disparition brutale d'Eugène
Dabit.
Hélas
pour Staline, le résultat de ce voyage ne sera pas celui escompté :
bien que très touché par l'accueil du peuple russe, Gide comprend
rapidement la vraie nature du régime soviétique, en pleine période
de purges politiques. A peine rentré en France, il prendra ses
distances avec le communisme en publiant un « Retour de
l'URSS » très critique...
Qui
l'a fait et à quoi ça sert ?
Ces
disques ont été édités dans les années 1930 par le Gramplattrest
(agence d'Etat de production de disques), parfois sous le label
SovSong. Il s'agit surtout de musique folklorique et de chants
traditionnels de Russie et des autres républiques de l'Union
soviétique (Géorgie, Bachkirie...).
André
Gide était un mélomane averti, lui-même bon musicien (il avait une
pratique régulière du piano), et il semble avoir écouté ces
disques attentivement. Ne parlant pas russe, il ne pouvait pas lire
les titres et pour se repérer, il a annoté les étiquettes et les
pochettes au crayon. La nature des enregistrements est précisée :
« basse d'homme », « chœurs
à la Boris » (référence à « Boris Goudounov »,
l'opéra de Moussorgski), « liturgique », « sans
voix – bouche fermée » . La qualité est aussi
évaluée : un disque est qualifié de « mauvais »,
un autre d' « indifférent »... mais plusieurs sont
« bon » ou « excellent ». Un disque reçoit
même la mention « excellent – mieux encore » ! il
s'agit d'un enregistrement de l'Ensemble Géorgien de tchonguri (un
instrument à cordes traditionnel).
Comment
est-ce arrivé au musée ?
La
famille paternelle d'André Gide était originaire d’Uzès. Le
musée d’Uzès a donc souhaité constituer un fonds consacré à
Gide, et organise régulièrement des expositions sur l’auteur et
son œuvre. Catherine Gide, fille de l’écrivain, a toujours
soutenu ces manifestations, et a offert de nombreux documents au
musée jusqu’à son décès en 2013. Les disques, conservés par
Gide et transmis à sa fille, font partie de ces dons : elle les
a offerts au musée en 2011.
L’objet du mois de juin 2023 : armoire peinte
A quoi ça ressemble ?
C’est une petite armoire
à deux portes. Sa forme est toute simple, rectangulaire, avec une
corniche en haut et une en bas. Elle est faite de bois communs
(aulne, sapin) : ni sculptures, ni matériaux précieux. Elle
porte un décor peint sur un fond sombre. Les portes sont ornées de
rinceaux feuillagés, de fleurs et d’oiseaux, ainsi que de
médaillons avec un portrait de femme et un portrait d’homme. Les
côtés portent de simples filets dorés.
A quoi ça servait ?
Cette armoire
servait sans doute à ranger du linge. A l’intérieur, pas de
penderie (les vêtements étaient rangés pliés) mais des étagères.
Notre armoire a été réaménagée au 20e
siècle. A l’origine il y avait probablement, en plus des étagères,
un ou deux tiroirs fermant à clé pour les objets plus précieux, et
en haut une étagère à chapeaux. Elle a pu être offerte pour un
mariage : les portraits de l’homme et de la femme
correspondent sans doute au couple de propriétaires.
De quand ça date ?
Ce type
d’armoire peinte est typique de notre région, elles sont
d’ailleurs souvent appelées « armoires d’Uzès ».
Ces meubles correspondent au style à la mode fin 17e
-début 18e , donc
au règne de Louis XIV (né en 1638, roi de 1643 à 1715).
Certaines armoires ont pu
être fabriquées plus tard ; il y avait souvent un décalage dans
les modes entre Paris et la province. Mais il semble qu’on a cessé
de fabriquer ces armoire après les années 1750.
Contrairement aux armoires
peintes de l’Est de la France, qu’on trouvait chez les paysans,
les armoires d’Uzès étaient utilisées par les gens aisés :
aristocrates et riches bourgeois.
Les 17e et 18e siècles
sont une période de prospérité économique pour Uzès et pour le
Gard grâce au textile (laine et surtout soie). L’élevage de vers
à soie est pratiqué dans toute l’Uzège, les filatures et la
fabrication de tissus et de bas de soie se développent. Les Uzétiens
fortunés font construire ou rénover des hôtels particuliers, et
achètent de beaux meubles. Les premières armoires peintes, ornées
de palmes et de couronnes, ont peut-être été inspirées par les
meubles en marqueterie Boulle (meubles en ébène incrusté de bronze
et d’écaille, créés par le fameux Boulle, ébéniste du roi) :
elles reprennent les mêmes couleurs rouge et or sur fond noir, mais
pour un prix beaucoup plus accessible. Mais d’autres armoires
portent des décors très différents : soit de petits panneaux
formant de véritables tableaux avec des paysages et des natures
mortes, soit des motifs purement décoratifs comme ici.
Ce décor
floral rappelle les tapis de la Savonnerie du milieu du 17e siècle,
mais les portraits en médaillons correspondent plutôt à la mode de
la fin du 17e-début du 18e siècle.
Les armoires d’Uzès
sont sommées par une corniche, mais le bas est généralement très
simple, avec des pieds découpés dans le prolongement des côtés.
La corniche du bas de notre armoire, très inhabituelle, a sans doute
été rajoutée au moment où les pieds ont été remplacés,
peut-être parce qu’ils étaient attaqués par les insectes ou la
moisissure.
Qui l’a fabriqué ?
La fabrication était
limitée au Gard. On peut toujours trouver des armoires peintes chez
des familles d’Uzès et de Nîmes. Il y a quelques exemplaires dans
des châteaux et musées ailleurs en France (Grignan, Aix) mais ils
ont sans doute été transportés assez récemment.
L’armoire
elle-même a pu être fabriquée par un menuisier (pas besoin
d’ébéniste car la forme est simple). Ensuite le décor a été
peint par un peintre, sans doute sur commande du client.
Malheureusement les artistes nous restent inconnus : les
peintres ne signaient pas souvent leurs œuvres avant le 19e siècle. Selon les armoires, certains décors sont plus ou moins
raffinés, parfois naïfs : les artistes étaient plus ou moins
doués (et sans doute plus ou moins chers).
Jusqu’au
19e siècle, il
n’y avait pas de séparation nette entre artistes et artisans. Les
peintres travaillaient sur commande, dans les mêmes conditions que
les artisans, avec une équipe d’assistants, des apprentis, et ils
réalisaient non seulement des tableaux mais aussi des décors pour
toutes sortes d’objets, selon la demande des clients :
plafonds, boiseries, meubles, carrosses…
A qui ça appartenait ?
Au
dos de l’armoire figure une inscription manuscrite : « N°
46 / Cdt de Bros / 1er Dragons / Lure ».
Il
s’agit certainement d’Henri-Frédéric Bros de Puechredon
(1848-1923), officier de cavalerie, commandant au 1er
régiment de Dragons à partir de 1893. L‘inscription correspond
sans doute au déménagement de l’officier lors de son affectation
à Lure (Haute-Saône).
Les
origines de la famille Bros de Puechredon se rattachent au Gard, plus
précisément à Anduze, à environ 50 km d’Uzès. Jean Bros
(1722-1797) était sieur de Puechredon, petit hameau près d’Anduze.
Son fils, également prénommé Jean, fut avocat et maire d’Anduze
en 1816. Aux générations suivantes on trouve Frédéric Jean
Madeleine (1789-1849), officier de marine, installé à Montpellier,
Alphonse Emile Charles Casimir (1820-1880), négociant puis banquier
montpelliérain, et enfin notre Henri-Frédéric, père d’une fille
sans descendance et d’un fils n’ayant eu lui aussi qu’une fille
sans enfants.
Il n’a pas été possible de remonter
davantage dans la généalogie de la famille Bros ; il faut
aussi envisager que l’armoire ait pu entrer dans la famille Bros
longtemps après sa fabrication, via la dot d’une épouse.
Comment est-ce arrivé
au musée ?
L’armoire a
sans doute été mise en vente à la mort de la dernière descendante
du commandant Bros de Puechredon, en 1976. Après un passage en 1998
chez un antiquaire bordelais, elle figure dans plusieurs ventes aux
enchères en 2012 mais à des prix trop élevés, jusqu’à sa
remise en vente à Marseille en 2013. C’est là
que l’association des Amis du Musée a pu en faire l’achat pour
l’offrir au musée.
L’objet du mois de mai 2023 : marmite en terre vernissée
A quoi ça ressemble ?
C’est un récipient sur
trois petits pieds, avec une poignée droite et un couvercle. Il est
en céramique de couleur jaune clair, décoré de cercles bruns.
A quoi ça servait ?
C’est un ustensile de
cuisine, une marmite ou poëlon (il a une poignée comme les poëles).
Les petits pieds servent à le caler sur les braises, car dans les
maisons paysannes d’autrefois, on cuisinait dans la cheminée.
Seules les cuisines des maisons bourgeoises et des châteaux
disposaient d’un véritable fourneau de cuisine (« potager »
en maçonnerie, et à partir de la fin du 19e siècle
cuisinières en fonte) sur lequel on pouvait utiliser des casseroles
à fond plat.
Ce type de récipient
permettait de faire cuire tout doucement des plats mijotés à
l’étouffée grâce au couvercle qui empêchait le dessèchement.
On pouvait préparer le plat et aller travailler aux champs en le
laissant cuire toute la matinée sans surveillance.
Qui l’a fait et
comment ?
Ce type de vaisselle était
produit à Saint-Quentin la Poterie, village près d’Uzès. Un
important filon d’argile réfractaire y a été exploité dès
l’Antiquité. La poterie a toujours été une activité importante,
au point de marquer le nom du village. Les potiers étaient
généralement aussi paysans : l’hiver, quand ils avaient
moins de travail agricole, ils fabriquaient de la vaisselle. C’était
une production très artisanale, en ateliers individuels et familiaux
(il y avait de véritables dynasties de potiers). La céramique était
fabriquée avec l’argile extraite localement, faite au tour,
vernissée avec une glaçure à base de plomb (qui donnait à la
terre beige rosé une couleur jaune plus ou moins vive) et cuite dans
un four à bois. Elle était diffusée sur les foires et marchés de
la région, mais la résistance au feu des poteries de Saint-Quentin
était reconnue jusqu’en Provence...
Le décor de cercles bruns a
été réalisé en appliquant l’extrémité d’une tige de bambou
ou de roseau trempée dans un engobe coloré avec de l’oxyde de
manganèse, qui donne une teinte brune à la cuisson. C’est ce que
l’on appelle le décor « au bambou ».
De quand ça date ?
La forme et le type de décor
de ce poëlon permettent de le dater de la fin du 19e
siècle.
Le 19e siècle
est l’âge d’or de la poterie à Saint-Quentin. Mais la
production va ensuite décliner, face à la concurrence de la
vaisselle de porcelaine et des casseroles en métal, fabriquées
industriellement, et qui arrivent jusque dans les campagnes grâce au
développement du transport de marchandises par chemin de fer. Les
ménagères préfèrent ces nouveaux produits, plus à la mode, plus
légers et plus solides que les vieux « toupins » de
leurs grand-mères,. De plus les poteries ne sont pas adaptées à
l’utilisation sur les cuisinières et poëles en fonte qui
commencent à remplacer les cheminées. La Première Guerre fauche de
nombreux potiers saint-quentinois, mobilisés sur le front. Le
dernier four de potier s’éteint en 1920. L’activité disparaît
jusque dans les années 1980 : la mairie de Saint-Quentin fait
alors le choix de relancer cet artisanat en encourageant des potiers
venus de toute la France, et même de l’étranger, à s’installer
au village. Désormais labellisée « Villes et Métiers
d’Art », la commune revendique aujourd’hui fièrement une
image de « capitale de la céramique », avec une
quarantaine d’ateliers de céramistes.
Comment est-ce arrivé au
musée ?
Georges Borias est nommé
conservateur du musée d’Uzès en 1946. Il s’attache à en
enrichir les collections, en particulier pour la céramique locale
dont il a perçu tout l’intérêt, et qui est alors délaissée.
C’est ainsi qu’il obtient de nombreux dons de la population de
l’Uzège : en une douzaine d’années, il fait entrer plus de
250 pièces au musée ! Notre poëlon a été offert en 1958 par
M. Boissin, entrepreneur à Uzès.
L’objet du mois d’avril 2023 : Portrait de Catherine Gide par Simon Bussy
A quoi ça ressemble ?
C’est un dessin au pastel, encadré
sous verre, représentant une jeune fille aux yeux noirs et aux
cheveux clairs, cadrée en buste. Sa tête est penchée, elle se
détache sur un fond gris neutre.
Qui l’a fait ?
Le dessin est signé et daté en bas à
gauche « Simon Bussy / 41 ». Simon Bussy est un peintre
né en 1870 à Dole dans le Jura, décédé en 1954. Formé à
l’Ecole des Beaux-Arts de Paris (dans la même classe qu’Henri
Matisse, qui restera un ami proche), il commence à exposer en 1897.
Ses sujets de prédilection sont les portraits, les paysages et les
animaux, qu’il représente en peintures et en pastels aux couleurs
éclatantes. En 1901, il séjourne à Londres. C’est là qu’il
fait la connaissance de Dorothy Strachey, membre d’une éminente
famille d’intellectuels britanniques, qu’il épouse en 1903.
L’année suivante, le couple s’installe à Roquebrune-Cap Martin (Alpes-Maritimes), où naît leur fille Janie en 1906. En 1918, les Bussy sont de
retour en Angleterre, où ils rencontrent l’écrivain André Gide,
qui séjourne à Cambridge. C’est le début d’une longue amitié.
Gide admire le travail de Simon Bussy, et lui achète de nombreuses
œuvres, principalement des pastels représentant des animaux. Quant
à Dorothy, elle traduit les textes de Gide en anglais. Lors de ses
séjours à Roquebrune, Gide sympathise aussi avec un autre peintre,
le belge Jean Vanden Eeckhoudt, ami et voisin des Bussy, si bien que
l’écrivain parle d’une véritable « oasis artistique de
Roquebrune ».
Qui est-ce que ça représente et de
quand ça date ?
C’est le portrait de Catherine, la
fille d’André Gide. Celui-ci, bien qu’homosexuel, avait épousé
sa cousine Madeleine, mais le couple n’avait pas eu d’enfants.
Gide va se constituer une deuxième famille « non
officielle » : il est ami du peintre belge Théo Van
Rysselberghe et de son épouse Maria, dite « la Petite Dame »,
qui devient sa confidente. C’est avec leur fille Elisabeth qu’il
a un enfant. Née hors mariage en 1923, la petite Catherine est
déclarée de père inconnu et élevée par sa mère ; Gide
attendra le décès de son épouse en 1938 pour reconnaître
officiellement sa paternité. Dès la naissance de Catherine, il est
très attaché à l’enfant et veille à son éducation.
Notre portrait a été réalisé dans
un contexte bien particulier, pendant la Deuxième Guerre. Gide a
quitté Paris pour la zone Sud, non encore occupée par les
Allemands. Il est hébergé à Cabris (Alpes-Maritimes), tout près
de la maison où vivent Maria Van Rysselberghe et sa fille Elisabeth.
Quant à Catherine, qui va avoir 18 ans, elle est à Nice. Après
avoir échoué au baccalauréat, elle cherche sa voie dans le théâtre
et a la possibilité de partir aux Etats-Unis. André Gide s’inquiète
de ce voyage dans des temps si incertains et a l’idée de commander
à Bussy un portrait de Catherine, comme le raconte Maria Van
Rysselberghe dans ses « Cahiers de la Petite Dame » :
le 3 février 1941, Gide vient lui rendre visite. « Il a
visiblement quelque chose à dire et comme toujours commence par le
détour : « Me trompé-je ou vraiment Catherine est-elle
de son mieux en ce moment, tout à fait séduisante, attirante...
[...] Ce charme, cet éclat, n’auront sans doute qu’un temps, et
puisque son départ se dessine de plus en plus et que sans doute elle
nous reviendra changée, pour garder un souvenir de ce moment, il
m’est venu l’idée de la faire peindre par Bussy – que vous
semble de cette idée ? » Elle ne trouve naturellement de
notre part qu’approbation et joie. Il téléphone sur-le-champ chez
Bussy et il charge Janie [Bussy]de pressentir son père à ce
sujet. »
Le peintre se met au travail la semaine
suivante. Gide écrit à Simon Bussy, le 22 février 1941 :
« Pierre H. [Pierre Herbart, le compagnon d’Elisabeth] est
revenu à Cabris ravi du portrait de Catherine, qui lui paraît, même
indépendamment de la ressemblance, une belle, très belle chose.
Tous, ici, nous jubilons – et il me tarde bien de le voir. »
Finalement Catherine ne partira pas aux
Etats-Unis, pas mais Gide conservera le portrait, transmis à sa
fille après son décès en 1951.
Comment est-ce arrivé au musée ?
La famille Gide était originaire
d’Uzès, et l’écrivain évoque ses souvenirs d’Uzès dans « Si
le Grain ne meurt ». Une salle lui est donc consacrée au
musée, enrichie par les dons de documents que Catherine Gide a eu la
générosité de faire à plusieurs reprises. Après sa disparition
en 2013, le musée a pu acquérir en 2020 auprès de ses descendants
un ensemble d’œuvres provenant de la collection de son père André
Gide et de l’atelier de son grand-père Théo Van Rysselberghe.
Parmi cet ensemble figurait ce beau portrait, qui a toute sa place au
musée pour conserver la mémoire de sa bienfaitrice.
L’achat a pu être réalisé grâce à
la Ville d’Uzès, au FRAM Occitanie et à l’association des Amis
du musée.
L’objet du mois de mars 2023 : Tête de jeune garçon, par Ketzkaroff
A quoi ça ressemble ?
C’est une sculpture en plâtre,
représentant une tête de jeune garçon.
Elle est recouverte d’une patine de couleur jaune.
Qui est-ce que ça représente ?
C’est le portrait d’un jeune
Uzétien, Henri de Parseval. La famille de Parseval est originaire du
Perche mais une de ses branches s’est installée à Uzès au 19e
siècle. Un Henri de Parseval (1875-1944) fut maire d’Uzès de 1928
à 1930. Le modèle de notre sculpture est son descendant Henri de
Parseval, né à Uzès en 1937 et encore adolescent à l’époque de
la réalisation de ce portrait. Par la suite, tout en restant attaché
à son Uzège natale, il a vécu à Châteauroux, où il est décédé
en 2021.
Qui l’a fait et de quand ça date
?
Le buste est signé et daté à
l’arrière : « Ketzkaroff 1949 ». Il s’agit de
Methody Ketzkarov, artiste bulgare né en 1904 à Sofia. Formé à la
sculpture à l’Ecole des Beaux-Arts de Sofia, après des voyages
d’étude à Paris en 1937 et en Egypte en 1938-1939, il revient en
Bulgarie et devient professeur de dessin.
Après la guerre, la quarantaine venue,
il entame une deuxième vie, quittant définitivement la Bulgarie. En
1947, grâce à une bourse du gouvernement français, il s’installe
à Paris et commence à explorer de nouveaux moyens d’expression :
l’aquarelle et la céramique. Dès 1949, il séjourne à Uzès
pendant l’été. Séduit par la cité, il y retourne les étés
suivants et s’y installe au début de l’année 1952, dans un
atelier minuscule, place de l’Evêché. Même s’il continue à
sculpter, il privilégie alors la poterie. En effet ses créations
céramiques rencontrent très vite un grand succès qui lui permet de
gagner sa vie mieux qu’avec la sculpture.
Si ses sculptures et ses aquarelles des
années 1949-1952 portent encore la signature « Ketzkarov »
(parfois orthographiée « Ketzkaroff »), très vite il
adopte le nom de Keskar, plus aisément prononçable par les
Uzétiens. C’est sous ce nom qu’il signe la plupart de ses
céramiques.
Après une dizaine d’années à Uzès,
Ketzkarov s’installe dans dans le Loiret puis revient dans le Gard
à Alès et enfin à Vallon-Pont-d’Arc, en Ardèche, où il décède
en 1981.
Réalisé lors du premier séjour de
Ketzkarov à Uzès, en 1949, ce buste s’inscrit dans la tradition
de la sculpture académique du 19e siècle, telle que
l’artiste l’avait apprise aux Beaux-Arts de Sofia. C’est un
moulage en plâtre à partir d’une ébauche modelée en terre crue.
Les traits du visage sont lisses mais le sculpteur a volontairement
laissé apparentes les traces d’outil dans la chevelure. Le
portrait semble assez fidèle au modèle ; le cou gracile et les
oreilles décollées ont sans doute été accentués pour contraster
avec le volume du crâne, mais l’ensemble reste sage, loin des
déformations géométriques ou expressionnistes de l’art moderne.
En 1947, Ketzkarov avait étudié à l’académie de la Grande
Chaumière à Paris, où avaient enseigné Bourdelle et Despiau :
il reste dans leur lignée, celle d’un retour au classicisme.
La patine jaune était peut-être
destinée à imiter le bronze, sans doute trop coûteux dans le
contexte de l’après-guerre encore marqué par le rationnement.
Comment est-ce arrivé au musée ?
L’artiste avait conservé ce buste,
il l’a prêté au musée pour une exposition en 1952 (« Noir
sur blanc, peintres graveurs parisiens »). En 1978, il l’a
donné au musée. Après le décès de Ketzkarov, avec l’aide de sa
veuve Marguerite (elle-même peintre), le conservateur Georges Borias
lui a rendu hommage en organisant au musée d’Uzès durant l’été
1982 une rétrospective de son œuvre. A cette occasion, Marguerite
Ketzkarov a fait don au musée d’un ensemble d’œuvres, dont
trois autres bustes de jeunes Uzétiens faits à la même époque, et
d’un style semblable.
L’objet du mois de février 2023 : buste du vice-amiral de Brueys
A quoi ça ressemble ?
C’est une sculpture en plâtre,
représentant une tête d'homme plus grande que nature, avec des
cheveux longs coiffés en arrière.
La
tête est posée sur une base cubique.
Qui est-ce que ça représente ?
C’est le portrait du vice-amiral de
Brueys (1753-1798). Né à Uzès, François Paul de Brueys
d'Aigaliers entre dans la Marine à 13 ans, en 1766. Devenu
lieutenant de vaisseau, il participe à la guerre d'indépendance des
Etats-Unis, ce qui lui vaut d'être fait chevalier de l'ordre de
Saint-Louis en 1783. Pendant la Révolution, sa carrière se poursuit
(malgré une brève destitution de 1793 à 1795) et il est promu
contre-amiral en 1796. Lors de la campagne d'Italie, le général
Bonaparte le remarque : il est nommé vice-amiral et chargé du
commandement de la flotte dans la campagne d'Egypte. C'est là qu'il
est attaqué par la flotte anglaise, commandée par l'amiral Nelson.
Il trouve la mort le 1er août 1798 lors de la bataille navale de la
baie d'Aboukir.
Qui l’a fait et de quand ça date
?
Brueys avait épousé en 1785 à la
Martinique Marie Anne Aubin de Bellevue, avec laquelle il avait eu
trois enfants. En 1857, longtemps après le décès de son époux, sa
veuve décide de lui rendre hommage en faisant ériger à ses frais
un monument à Uzès. C’est le sculpteur parisien Francisque Duret
(1804-1865) qui en sera l’auteur. Prix de Rome en 1823, Duret est
un artiste reconnu, auteur de nombreuses commandes officielles :
il a notamment réalisé la sculpture de la fontaine Saint-Michel à
Paris. Mme de Brueys lui demande de représenter le vice-amiral
« fier et beau comme un enfant du Midi, comme un enfant
d’Uzès ! ». Il a en effet fière allure, en uniforme,
cheveux au vent, la longue-vue dans une main, l'autre main sur la
poignée de son sabre, avec l’inscription « Un amiral
français doit mourir sur son banc de quart » rappelant les
mots qui lui sont attribués lors de sa mort à Aboukir. La statue en
bronze se dresse sur un socle en pierre dessiné par l'architecte
Simon-Claude Constant-Dufeux (1801-1871).
Installé sur la promenade des
Marronniers, au carrefour de la route de Bagnols-sur-Cèze, le
monument est inauguré en grande pompe le 20 octobre 1861, avec une
cérémonie suivie d’un bal public et d’un feu d’artifice.
Gendarmerie, armée, officiels se succèdent, avec d’autant plus de
solennité que le gouvernement de Napoléon III (neveu de Napoléon
Ier) tient à rappeler la grandeur des campagnes de Bonaparte... Le
seul descendant présent du vice-amiral est son petit-neveu, le baron
de Fontarèches : en effet ses deux filles sont mortes jeunes et
son fils est décédé en 1857 sans descendance. Quant à Mme de
Brueys, elle s’est éteinte en 1859, à 92 ans.
Mais la gloire du vice-amiral ne durera
pas longtemps : comme tant d'autres monuments en bronze, la
statue est visée par la réquisition des métaux non ferreux lancée
en 1941 par le gouvernement de Vichy. En février 1942, elle est
envoyée chez un fondeur à Béziers, avec un sursis de quinze jours
avant la destruction afin que la commune d'Uzès puisse faire un
moulage à ses frais. Sans doute par manque de moyens, seule la tête
est moulée. C'est le sculpteur perpignanais Fernand Delfau
(1909-1975), installé à Uzès après son mariage en 1936 avec une
Uzétienne, qui se charge du moulage. Quant au socle, il reste
plusieurs années en place avant d’être démonté.
Comment est-ce arrivé au musée ?
Le moulage ayant été
commandé par la commune, a sans doute été livré à l’hôtel de
ville et installé à l’étage, où se trouvait alors le musée.
Lorsqu’en 1945 le conservateur Georges Borias a rédigé
l’inventaire des collections du musée, il y a inclus le moulage,
signalant son arrivée en 1943. Il rejoignait un portrait de Brueys
peint à la fin du 18e siècle, qui y figurait déjà.
Ce moulage est tout ce
qui nous reste du monument, avec une partie du socle, placée en bas
de l’escalier qui mène du Portalet à la cathédrale. Pour
l'imaginer, il faut donc regarder les nombreuses cartes postales
anciennes qui le représentent...
L’objet du mois de janvier 2023 : photographies du GMR Cévennes à Uzès
Qu’est-ce que c’est ?
C’est un ensemble de 24 photographies en noir et blanc, représentant un bâtiment ancien, avec des vues extérieures et intérieures. Dans la cour devant le bâtiment sont garées des voitures et motos. A l’intérieur sont installés des bureaux, des salles d’instruction, des dortoirs, un réfectoire, des cuisines et des ateliers, ainsi que des magasins de matériel militaire (fusils, uniformes).
Qu’est-ce
que ça représente ?
Ces
photos ont été prises dans l’ancien évêché d’Uzès. La ville
fut le siège d’un évêché du 5e
siècle à la Révolution. Les bâtiments médiévaux du quartier
cannonial furent détruits pendant les Guerres de Religion. La
cathédrale fut reconstruite de 1642 à 1663, complétée par un
véritable palais épiscopal. Construit de 1663 à 1673, l’évêché
était organisé sur le modèle des hôtels particuliers parisiens :
implanté entre cour et jardin, il possédait une entrée centrale
surmontée d’un balcon. L’accès aux étages se faisait par un
escalier monumental. Les appartements privés de l’évêque, au
premier étage, étaient ornés de magnifiques cheminées en stuc et
de plafonds peints. Ils communiquaient directement avec la tribune de
la cathédrale.
De
quand ça date ?
Après
la Révolution et la supression du diocèse d’Uzès, le bâtiment
de l’évêché a connu différentes utilisations. Il a servi de
prison pendant la Terreur puis on y a installé le Tribunal au
rez-de-chaussée. Au 19e
siècle le premier étage a accueilli les bureaux de la
sous-préfecture, jusqu’à ce que celle-ci soit supprimée en 1926.
Les étages sont restés inoccupés jusqu’à la Deuxième Guerre.
C’est alors que le bâtiment accueille un Groupe Mobile de Réserve.
Créés par le gouvernement de Vichy en 1941, les GMR sont une sorte
de gendarmerie mobile, à la disposition des préfets pour assurer la
protection civile et la sécurité publique. Dans les faits, cela
consiste surtout à lutter contre les forces de la Résistance. Le
GMR Cévennes est affecté à Uzès et installé dans l’ancien
évêché en 1942. Il comptera jusqu’à 250 hommes.
Les
photographies, prises vers 1942, montrent l’évêché bien mal en
point avec sa façade aux fenêtres bouchées ou recoupées. La
grande salle du premier étage est cloisonnée et transformée en
salle d’instruction, ornée de fresques à la gloire du maréchal
Pétain... Le confort est sommaire : dortoirs avec lits en fer,
grand lavabo collectif. Les tables à tréteaux du réfectoire sont
installées dans les anciens appartements de l’évêque, devant la
belle cheminée rescapée du 17e
siècle. Un soldat en faction occupe une guérite devant le portail.
Dans la cour se dresse se dresse un mât portant le drapeau
tricolore, qui voisine avec les installations sportives prévues pour
l’entraînement (agrès, panier de basket-ball). Les anciennes
écuries sont transformées en garage pour les voitures.
A
la Libération, plusieurs membres des GMR seront condamnés par les
commissions d’épuration, et les GMR seront dissous en 1945. Ils
sont alors remplacés par les CRS : à Uzès, c’est la 162e
Compagnie Républicaine de Sécurité qui occupera à son tour les
locaux de l’évêché jusqu’en 1971. Le bâtiment est alors
racheté par la commune d’Uzès qui y installe la bibliothèque
municipale et le musée (ouvert en 1978), et construit une salle
polyvalente à la place des anciennes écuries. Peu à peu le
bâtiment, classé au titre des Monuments Historiques en 1981,
retrouve un peu de sa superbe après des années d’abandon...
Comment
est-ce arrivé au musée ?
Ces
photographies ont été achetées par les Amis du musée à un
collectionneur privé en 2010.
L’objet du mois de décembre 2022 : canne d’André Gide
L’objet du mois de novembre 2022 : chapiteau roman
L’objet du mois d’octobre 2022 : vue de l’église Saint-Etienne
L’objet du mois d’août 2022 : trompe de chasse
L’objet du mois de juin 2022 : deux pots de pharmacie
L’objet du mois de mars 2022 : « Jamais sans sa redingote », de Mireille Laborie
L’objet du mois de décembre 2021 : Portrait de Janie Bussy, par Jean Vanden Eeckhoudt
Radio Fuze a cessé d'émettre entre 2019 et 2021, dans l'attente d'une fréquence définitive sur 107.5 FM.
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L’objet du mois de décembre 2017 : stèle funéraire de tonnelier
L’objet du mois de mai 2017 : "Le Voyage au Congo" d'André Gide
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Emission spéciale « Journées Catherine Gide »
Les 23 et 24 avril ont eu lieu les troisièmes Journées Catherine Gide au Lavandou : deux jours de conférences et de rencontres autour d'André Gide. Fréquence Musées y était, et vous fait découvrir la personnalité hors du commun de l'amie de Gide, Maria Van Rysselberghe, surnommée la « Petite Dame », révélée par une exposition à l'Hôtel de Ville du Lavandou, à voir jusqu'au 30 mai 2016.
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L’objet du mois d'octobre 2015 : « La Lutte d’hommes », par José Belon
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L’objet du mois d’août 2015 : drapeau des Sapeurs-Pompiers d’Uzès
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L'objet du mois de mai 2015 : chaise à porteurs de la famille d'Amoreux, 18e siècle
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L’objet du mois d'août 2014 : « Le jour de la grève, pont du Rialto, Venise, 1904 » par Marcelle Rondenay
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L’objet du mois de mars 2014 : brique de la fabrique Ducros à Saint-Quentin la Poterie
L’objet du mois de février 2014 : « Carmen » par Henri Allouard
L’objet du mois de janvier 2014 : bannière des cheminots catholiques d’Uzès
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L’objet du mois de décembre 2013 : pipe en terre « Jacob », fabrique Job Clerc
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L’objet du mois de novembre 2013 : « Etude de tête et de mains » par Melchior Doze
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L’objet du mois d'octobre 2013 : portrait tissé de Xavier Sigalon
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Exceptionnellement, pas d'Objet du mois en août 2013
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L’objet du mois de juillet 2013 : défense de mammouth
L’objet du mois de juin 2013 : calebasses gravées de Guyane
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L’objet du mois de mars 2013 : « Les brodeuses de Pont-l’Abbé », par Berthe Bourgonnier-Claude
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L’objet du mois de novembre 2012 : carreaux de pavement du 14e siècle
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4 commentaires:
Bonjour,
Il est noté dans votre notice que le duchesses d'Uzès avait un château à Bonnelles
Ce qui est exact...
Par contre Bonnelles se trove dans la région parisienne, dans l'actuel département des Yvelines et non en Bourgogne
Cordialement
Bonjour,
merci pour cette précision, j'ai corrigé le texte.
bien cordialement
La Conservatrice
Bonjour,
Je ne sais pas s'il y a un rapport mais au sujet du tableau "Les brodeuses de Pont-l'Abbé", offert par la duchesse d'Uzès, née Mortemart, au musée, la famille de Mortemart possédait à l'époque où le tableau a été peint le château du Cosquer à Combrit, commune distante de quelques kilomètres de Pont-l'Abbé.
Bien cordialement,
Serge Duigou.
Bonjour,
merci pour l'information, c'était sûrement une motivation supplémentaire pour la duchesse dans le choix de cette oeuvre !
bien cordialement
La Conservatrice
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